Le Prince de l'Espace

Pour ma deuxième participation au Summer StarWars, j'ai continué à lire l'anthologie The Space Opera Renaissance, qui se poursuit par un space-opera très ancien aussi, Le Prince de l'Espace (The Prince of Space) de Jack Williamson. Le titre n'est pas sans évoquer (ainsi que Gromovar me l'a fait remarquer) le fameux Actarus, prince d'Euphor dans la série animée Goldorak. Le Prince de l'Espace est une nouvelle plus longue que Les voleurs d'étoiles et c'est aussi une histoire plus récente car elle date de 1931. Ce qui ne l'empêche pas de poser des questions très actuelles...

Résumé :
Au XXIIème siècle, la banlieue proche de la Terre est explorée par des nefs solaires. La Lune est colonisée. Une expédition s'est rendue sur Mars quelques années plus tôt mais s'est perdue et ne donne plus de nouvelles. Les précieuses nefs solaires, pour se déplacer dans l'espace, utilisent un métal très rare, le vitalium, présent aussi à l'état de traces dans les vitamines des cellules vivantes. Hélas, c'est une ressource très convoitée : un homme, le mystérieux "Prince de l'Espace", pille les cargos qui le transportent. Un jour, une cargaison est volée, si bien que tous accusent le Prince d'un nouvel acte de piraterie. Pourtant, le fait que l'équipage et les passagers n'aient pas survécu à l'assaut intrigue, car le Prince n'a jamais agi en tueur ; d'autant plus que les cadavres ne contiennent plus une seule goutte de sang... La Patrouille Lunaire reçoit l'ordre de mettre fin aux agissements du Prince. Mais le monde ne se trompe-t-il pas d'ennemi, alors que les télescopes de la Tour Trainor, braqués sur la planète Mars, découvrent les traces d'une activité aussi étrange qu'inquiétante ?

Tout comme Les voleurs d'étoiles, cette histoire accuse un peu son âge. Les libertés prises avec le contenu scientifique sont assez nombreuses (l'atmosphère de Mars est ici respirable par des êtres humains, les nefs solaires se déplacent à une vitesse sans doute peu réaliste, le fameux vitalium sert d'élément clé aussi bien aux moteurs qu'à l'arme ultime et les armes nucléaires des habitants de Mars sont peu vraisemblables) mais encore une fois, n'oublions pas qu'il ne s'agissait pas de littérature d'anticipation...

A la lecture il s'avère que des points communs assez nombreux semblent exister entre cette nouvelle et la série Goldorak. Le Prince de l'Espace (le personnage) est soutenu par un scientifique terrien. Il dissimule pendant la majeure partie de l'histoire ses sentiments pour une jeune femme (en l'occurrence, la fille du Docteur Trainor) avant de réaliser l'importance qu'elle a pour lui et pour ses projets. En face, les ennemis extraterrestres sont cruels, déterminés, différents et répugnants, si bien qu'aucune cohabitation n'est possible entre eux et l'espèce humaine : l'alternative, pour les héros de l'histoire, est donc l'esclavage (pour eux) ou l'extermination (des habitants de Mars). Voilà une morale binaire qui est bien plus affirmée que dans Les voleurs d'étoiles, ce qui n'est pas sans me déranger quelque peu.

Le Prince de l'Espace contient cependant quelques bonnes idées. Je citerai tout d'abord, et bien entendu, la fameuse Cité de l'Espace, le repaire du Prince, une station spatiale dissimulée dans la banlieue terrestre, véritable base de repli mais bien plus que cela en même temps puisque l'auteur prend soin de la décrire, et donc de la penser, comme un écosystème complet (comme quoi, la SF parlait déjà d'écologie plus de trente ans avant Dune). Quant à la sagesse des personnages, qui décident à la fin de la nouvelle de faire disparaître l'arme terrible grâce à laquelle ils ont pu éliminer la menace, craignant que l'espèce humaine en fasse un mauvais usage, elle m'apparaît très intéressante. Surtout dans un monde qui n'avait pas encore connu, à l'époque, la menace des armes nucléaires.

Commentaires

El Jc a dit…
Pourquoi pas à l'occasion. Tu as fais de belles fouilles pour nous ramener à la surface de tels titres !
Anudar a dit…
Merci les anthologies :) !
Dune Jacurutu a dit…
Ce genre de SF nous rappelle utilement qu'avant d'être un "genre" avec ses codes, ses habitudes et ses lecteurs, la SF a longtemps été une variante du roman d'aventures.
La matrice du pulp qui réunissait western, horreur, érotisme, SF ou polar était encore très étrangère à l'esprit de chapelle qui s'est renforcé dans l'après-guerre.
Finalement, quand on voit des écrivains de SF se revendiquer d'une approche " sans frontières " de genres, je me demande s'ils ont conscience que leurs prédécesseurs étaient plus libres et moins formatés qu'eux.
Dans une interview, FH disait avoir été nourri dans sa jeunesse par le théâtre shakespearien et les aventures produites industriellement par les pulps.
Sacrée généalogie ;-)