Dark saison 1

Arrivée il y a peu de temps sur le service de streaming auquel je suis abonné (il ne sera pas difficile de savoir duquel il s'agit...), la première saison de Dark se présentait accompagnée de la meilleure des recommandations qui se puisse être pour moi ces derniers temps, à savoir une comparaison assez appuyée avec Stranger Things. Il y avait là de quoi éveiller mon intérêt...
Résumé : 
Winden est une petite ville allemande perdue au beau milieu d'une forêt sombre et impénétrable. Une partie de sa prospérité provient de sa centrale nucléaire dont l'exploitation a commencé au milieu des années 1950. En novembre 2019, Jonas s'apprête à retourner au Lycée duquel il s'est absenté pendant des mois, suite au suicide de son père et à son propre internement en hôpital psychiatrique, au moment même où la ville est remuée par la disparition énigmatique d'un adolescent. Quelques heures plus tard, la disparition de Mikkel, petit frère d'un de ses amis, soulève de nouvelles questions : un meurtrier serait-il à l'oeuvre au coeur de la petite ville si tranquille ? Alors que des personnages étranges se mettent à rôder, alors que le père de Mikkel, policier, croit vivre une réédition du cauchemar que sa famille a vécu en 1986 au moment de la disparition tout aussi énigmatique de son petit frère Mads, certains protagonistes commencent à interroger les liens entre ces événéments : y aurait-il quelque chose de pourri à Winden ? Mais si c'est le cas, d'où provient le pourrissement... ou plutôt, quand donc la pourriture serait-elle apparue pour la première fois ?
Même si les éléments de Dark semblent à première vue assez similaires à ceux d'un Stranger Things - une petite ville, un établissement scientifique et industriel, une disparition d'enfant - et même si l'idée de cycle néfaste évoque bel et bien Ça, il convient de ne pas trop se fier aux apparences. Même si l'ambiance générale de Dark est sombre (comme son nom l'indique), même si cet univers est glauque à souhait, même si la pluie brouille l'humeur de ses personnages comme celle de ses spectateurs, même si sa musique inquiétante inspire le malaise, on n'est pas dans l'horreur, et en tout cas pas dans l'horreur sensationnelle car l'argument de cette série tient bel et bien au voyage temporel. 1953, 1986, 2019... un cycle de trente-trois ans, marqué par des disparitions d'enfants ou d'adolescents, mais aussi par l'apparition de cadavres de garçons inconnus, aux yeux brûlés, à l'oreille interne ravagée, comme s'ils avaient subi des expérimentations. Sous la ville et sous la centrale nucléaire, des grottes où l'on peut se perdre - et où, peut-être, certains couloirs ouvrent vers d'autres époques. Le passé détermine le présent, et celui-ci l'avenir, mais parfois l'avenir vient agir sur le passé en retour : dans la synchronisation entre les époques, il m'est difficile de ne pas voir une évocation de la notion de "physio-temps" développée par Isaac Asimov dans La Fin de l'Eternité : tout procédé de voyage dans le temps implique la subordination de la flèche du temps universel à celle du voyageur. Mais que se passe-t-il quand se mettent à coexister plusieurs voyageurs distincts ? Cette épineuse question, posée par Charles Stross dans son génial Palimpseste, méritait bien d'être abordée à l'écran : il suffira de dire que telle a été, de toute évidence, l'ambition des auteurs de Dark.

Certes pas d'horreur sensationnelle dans Dark, et pourtant, à celle-ci se substitue plus volontiers une horreur psychologique : les monstres de Winden ne sont pas venus d'une autre planète ou d'une autre dimension, ils portent le costume de la respectabilité, celle de l'humanité au-dessus de tout soupçon car banale. Et pourtant ils mentent, frappent, trahissent, et manipulent : ces monstres sont ceux qui considèrent que tout peut s'acheter, parfois même au prix d'une ou de plusieurs vies. Le mal prend un visage ordinaire dans Dark, et ce n'est peut-être pas un hasard si cette série est allemande... Dans cet océan d'inhumanité, surnagent quelques personnages éblouissants qui ne cèdent pas à leur part d'ombre, quitte à tout sacrifier. Jonas, bien sûr, dont le destin sera contrarié par une véritable malédiction aux accents de tragédie antique et quasi-oedipienne ; Mikkel aussi dont le comportement lors du premier épisode évoque le fardeau de la prescience et en même temps énonce la question qui agit en leitmotiv de la série... Dans toute histoire sombre, il est bon d'avoir quelques points de repère plus lumineux : en n'oubliant pas cette règle trop souvent négligée par des auteurs qui se complaisent dans la facilité de l'imaginaire morbide, la série Dark termine de confirmer son intérêt... Il est certain que j'en regarderai la suite quand elle sera disponible !

Commentaires

chéradénine a dit…
Tiens, une autre personne qui a beaucoup aimé Palimpseste de Stross: je l'avais fait lire à un membre de ma famille qui n'en avait pas dit grand chose et ça m'avait frustré. Bref, étant abonné à Netflix avec des tonnes de programmes cochés dans ma liste "à voir", je penserai à Dark !
Anudar a dit…
Bienvenue à bord ! Et oui, "Palimpseste" est l'un des livres les plus puissants qui soient passés par ce blog...