Le garçon du goûteur

Je poursuis ma lecture de l'Anthologie des Utopiales édition 2018 avec cette fois-ci un texte écrit par Ben H. Winters, un auteur que je n'ai jamais lu a priori...
Résumé : 
Des années après la fin de la Dernière Guerre, C. règne sans partage sur le monde. Sa volonté transcende celle de tout individu et son pouvoir dépasse de très loin celui de n'importe quel tyran dont l'Histoire garde le souvenir. Pourtant, C. finit par s'ennuyer : que reste-t-il à faire quand on a écrasé toute forme de résistance ? Est-il même possible de susciter un nouvel ennemi pour ne plus avoir à se dire "et maintenant" ?
Le monde est unifié, le monde connaît la paix, mais le monde connaît aussi la terreur d'un pouvoir sans aucune forme de contrôle. C. apparaît ici comme un avatar de despote oriental : il n'est peut-être pas divinisé comme un Xerxès mais sa violence est la seule qui peut encore s'appliquer - ce qu'il fait à intervalles réguliers pour que nul n'oublie qui est aux commandes. Et le monde finit par s'en accommoder : l'idée même de résistance a disparu, les gens ayant renoncé aux armes qu'ils avaient dissimulé dans un premier temps.

Pour C. qui s'ennuie, la solution paraît évidente lorsqu'il croise un enfant au regard défiant : celui qui n'a pas encore appris à le craindre peut apprendre à le haïr - premier pas vers la mobilisation des ressources nécessaires à une révolution. Mais là où C. se trompe, c'est que la violence intellectualisée ne peut susciter - en réaction - que de la violence primitive, pour ne pas dire animale : quand l'être humain cesse d'avoir l'espace nécessaire à sa propre révolte, il cesse d'être tout à fait humain. La solution qui émerge donc du protocole rigide conçu par C. surprend donc à la fois le tyran et le lecteur : en ce sens, Le garçon du goûteur se révèle un texte herbertien de très bonne facture...

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