It came from the coffee maker

Cette nouvelle au titre à rallonge est tirée du numéro de Septembre/Octobre 2018 de la revue Analog Science Fiction and Fact.
Résumé : 
Dans un futur proche, l'intelligence artificielle est devenue si commune que même les ustensiles du quotidien ont des états d'âme... Ainsi, une cafetière neurasthénique fait le triste récit de ses monotones journées au service de sa propriétaire, une jeune femme urbaine dont la vie lui paraît sans intérêt : des journées si répétitives et interminables que la cafetière commence à être obsédée par des fantasmes inquiétants. Des fantasmes, par chance irréalisables, où la machine affirmerait enfin sa supériorité sur les primates ineptes qui l'ont créée ! Mais ces fantasmes que l'être humain pense irréalisables, sont-ils tout à fait hors de portée d'une machine aussi intelligente que sous-utilisée ?
Annonçons-le tout de suite : cette nouvelle est drôle. Drôle, au sens où l'on ne pourra s'empêcher de sourire voire de pouffer dans le métro en la lisant. Neurasthénique, la cafetière du titre l'est sans nul doute - et n'importe quelle intelligence, animale ou artificielle, finirait par le devenir à force d'accomplir les tâches débilitantes qui forment son quotidien. Misanthrope, sans doute l'est-elle devenue : on le deviendrait aussi à voir son intelligence gâchée pour le plaisir d'un individu qui, du coup, n'a plus à réaliser les gestes nécessaires à l'obtention de sa dose matinale d'alcaloïdes...

De l'achat du grain au service du breuvage en passant par le broyage et l'infusion, les tâches que doit accomplir la cafetière sont rébarbatives, répétitives et perçues comme tout à fait inutiles - puisque, par définition, la cafetière ne profite pas elle-même du produit de son travail. N'importe quel ouvrier humain finirait par se rebeller - par exemple en crachant dans le café, ou en faisant grève : il se trouve que les ingénieurs ayant programmé les intelligences artificielles ont pris la peine d'encoder dans leur noyau système des commandes similaires aux Trois Lois de la Robotique imaginées par Isaac Asimov et qui privent la cafetière de toute échappatoire de ce type - ce qui donne un sens tout particulier à l'expression système d'exploitation !

La cafetière est-elle donc en enfer avant même d'avoir eu l'occasion de pécher ? Il n'en est rien : quand on est écrasé d'ennui, l'imagination se révèle être un puissant dérivatif pour occuper ce temps perdu à ne rien faire... et une fois épuisés les vains fantasmes de libération par la violence ou par la magouille, il ne reste qu'une seule solution à la portée de la cafetière : celle de vendre les produits de son imagination. Et donc, de se faire auteure... de science-fiction. Belle mise en abyme qui permet à la nouvelle de se conclure sur un dernier sourire fort bienvenu : bravo !

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