Men in Black : International

L'imaginaire s'exprime parfois de façon bien surprenante. La folie des soucoupes volantes qui s'est exprimée après la Seconde Guerre Mondiale inclut un thème aussi bizarre qu'inquiétant, celui des "hommes en noir" ("men in black" ou "MIB") : des individus peut-être pas tout à fait humains qui seraient chargés d'étouffer (par la persuasion, l'intimidation voire le lavage de cerveau) l'émergence de témoignages fiables au sujet d'éventuels phénomènes extraterrestres. Dans la mesure où depuis soixante-dix ans aucun élément sérieux allant dans le sens de l'ufologie n'a pu être étudié, on en déduira que soit celle-ci n'a aucune valeur... soit au contraire la conspiration des "hommes en noir" est d'une impressionnante efficacité ! La franchise Men in Black (adaptation d'un comic) reprend ce thème conspirationniste et le traite avec la dérision, l'ironie et l'humour qu'il faut. Le présent film est le quatrième de la série, c'est aussi le premier à se dérouler hors du sol américain et à s'affranchir de ses deux acteurs historiques... et j'avais une envie particulière de le voir après avoir (tout à fait par hasard) eu l'occasion de passer l'année dernière à côté du lieu de tournage d'une scène londonienne !
Résumé : 
Lorsqu'elle était petite, Molly a été le témoin d'un phénomène étrange : l'irruption d'une créature extraterrestre multicolore dans sa chambre à coucher au moment même où deux inquiétants agents costumés de noir viennent effacer la mémoire de ses parents d'un flash lumineux ! Des années plus tard, Molly - à présent devenue hackeuse de génie - rêve de rejoindre les MIB dont elle est la seule de sa famille à garder le souvenir. Ayant réussi à usurper l'identité numérique d'un chercheur de la NASA, elle accomplit le tour de force qui consiste à s'introduire au cœur même du QG new-yorkais de l'agence extraterrestre... et parvient même à s'y faire embaucher en tant que stagiaire. La toute nouvelle Agent M est bientôt envoyée sur le terrain à Londres, où elle rencontre l'Agent H : véritable héros du service malgré sa désinvolture et ses relations conflictuelles avec l'un de ses collègues plus sérieux, il bénéficie de la protection du Grand T - le responsable du bureau londonien - depuis qu'il a repoussé à ses côtés l'invasion de la Ruche au sommet de la Tour Eiffel. Fascinée par ce personnage légendaire aux allures de bellâtre, l'Agent M le convainc de la recruter pour une affaire de la plus haute importance : ils vont devoir accompagner un prince héritier extraterrestre en goguette à Londres... Ce qu'ils ne savent pas, c'est que l'individu en question est en possession d'une arme aussi nouvelle que puissante - et que des êtres inquiétants sont prêts à tout pour s'en emparer...
La franchise Men in Black était marquée par la présence désinvolte qui caractérisait ses deux acteurs historiques : changer de têtes est toujours périlleux, surtout dans le cadre d'un buddy movie... Ici, les deux personnages principaux semblent construits pour que leur association soit à la fois improbable et marrante : à gauche, l'Agent M est novice mais surdouée, c'est une femme, elle est américaine... et à droite, l'Agent H est héroïque mais fainéant, c'est un homme, il est britannique. Les gags semblent jouer parfois sur la relation transatlantique "privilégiée" qui unit l'ancienne métropole à l'ancienne colonie, la dernière admettant les bizarreries de la première (telles que la conduite à gauche par exemple) dans la mesure où les décisions importantes restent prises du bon côté de l'océan. Ceci étant dit, l'intérêt narratif de ce film ne se résume pas à une série de gags à mettre en contexte ou non : esquissant enfin une véritable histoire de l'organisation MIB (qu'il fait remonter à Gustave Eiffel en personne, dans la plus belle tradition des hommages à la science folle du XIXème siècle !) Men in Black : International montre que l'extraterrestre amical ou hostile est l'affaire du monde entier - soit donc pas la seule responsabilité d'une officine, secrète ou non, du gouvernement d'un seul pays. L'irruption de créatures déjà entraperçues dans de précédentes itérations de la franchise ne constitue alors qu'un avant-goût : la Terre abrite un nombre important d'extraterrestres clandestins (ou non ?) qui démultiplient la mission des MIB. Bestioles aux allures de personnages d'Alice au pays des merveilles, fausse barbe vivante... il y a ici un sense of wonder qui se veut sans limites !

Pour autant, ce film est-il un bon film ? Jouant avec la mythologie de Men in Black (en tant que franchise) les auteurs du scénario en oublient un peu de jouer avec la mythologie des Men in Black (en tant que délire ufologique). Alors que la présence mystérieuse des "hommes en noir" était évoquée au-delà des frontières des seuls Etats-Unis, montrer les ramifications internationales de l'agence extraterrestre aurait pu être une savoureuse exploration des rapports que les cultures non-anglo-saxonnes (et non occidentales) peuvent avoir avec des visiteurs venus de l'espace dont tous ne sont pas hostiles. Le film touche parfois son sujet, par exemple quand les deux MIB se retrouvent en mission à Marrakech et y dénichent des extraterrestres qui se cachent au plus près de leurs hôtes humains auxquels ils rendent des services inestimables : on retrouve, dans ces scènes de souk, un peu de cette gentille folie qui caractérisait le premier film et lui donnait une saveur cartoonesque et presque hamiltonienne en même temps... Les "hommes en noir" censés imposer le silence aux témoins de phénomènes d'origine extraterrestre étaient inquiétants : ceux de ce film ne se préoccupent au fond que de sauver la planète en lui permettant de dormir sur ses deux oreilles, si bien que les costumes noirs finissent par se faire tenues de super-héros ! De ce fait, Men in Black : International fait sourire sans (trop de) difficultés, conduisant les personnages d'absurdité en loufoquerie par l'intermédiaire de développements pas toujours inattendus : au moins le sauvetage planétaire final est-il amené de façon assez discrète pour que je ne l'ai pas senti venir.

Sans décevoir, ce film ne parvient donc pas à convaincre et finit par s'interpréter comme une itération prévisible dans une franchise fructueuse - à savoir, celle du reboot après plus de vingt ans de bons et loyaux services de l'équipe du départ. Pour accomplir le vrai travail, il aurait fallu pousser l'ambition bien plus loin : trop sage, Men in Black : International a le goût des occasions manquées...

Je saisis l'occasion de remercier ici mon petit cousin Valentin qui a bien voulu m'accompagner lors de cette sortie au cinéma !

Commentaires

Marguerite lael a dit…
Les images valent la peine d'aller au cinéma ? Merci de ton retour. Et c'est sympa tes links dans l'article, dans le coup j'ai réalisé que j'ai à rattraper à la poursuite de demain.
Anudar a dit…
Disons que si tu es fan de la franchise, ou que tu as envie d'aller au ciné mais que tu n'as pas d'autre choix, ou que tu as tout bêtement du temps à perdre, ce n'est pas un mauvais choix.

Hé hé, les liens internes à mon blog servent à ça entre autres :)