Star Wars Episode IX

Tous les voyages, toutes les épopées prennent fin tôt ou tard. Si Star Wars n'a pas pris fin - cet univers promettant d'être encore exploité au cinéma et ailleurs dans les années à venir - cet Episode IX représente à tous points de vue un tournant, celui du passage dans une époque et une phase nouvelles... Quand j'ai découvert Star Wars au cours de mon enfance, j'avais remarqué dans le fameux panneau déroulant du Retour du Jedi qu'il s'agissait du sixième épisode de la saga - mais je savais fort bien qu'il ne que s'agissait du troisième de ces films. L'énigme, en partie levée à la faveur d'une explication offerte sur l'instant par mon père, s'était tout à fait dissipée en 1999 lors de mon premier visionnage au cinéma de l'Episode I. L'arrivée à partir de 2015 de la postlogie Star Wars avait compliqué la lecture de l'oeuvre - si bien que la question de savoir dans quel ordre il convient de regarder Star Wars devenait pertinente ! - mais il n'était pas difficile d'en avoir conscience dès le début : l'Episode IX représentait par avance le point culminant de toutes les intrigues de la saga. Un épisode de Star Wars correspond en effet à une triple unité : la sienne propre, celle qu'il occupe au sein de sa trilogie et celle qu'il occupe dans la saga. C'est en ce sens que l'Episode IX, dernier en date, méritait l'attention des amateurs ; c'est pour cette raison que j'ai été si heureux par avance d'aller le voir en compagnie de mon cousin Valentin qui a entrepris ce voyage à mes côtés depuis 2016... Attention, la chronique ci-dessous va inclure des spoilers sans autre avertissement préalable !
Résumé : 
La Résistance a subi un choc douloureux, mais le Premier Ordre lui-même titube. Alors que les adversaires lèchent leurs blessures, un terrifiant appel conduit le Suprême Leader Kylo Ren sur un monde enténébré où l'attend nul autre que Palpatine - revenu d'entre les morts et maintenu en vie par d'affreux artifices ! L'Empereur déchu veut conclure une alliance avec le fils de Leia passé au côté obscur : il met à sa disposition une flotte d'extermination permettant d'asservir toute la Galaxie... en échange de quoi Kylo Ren ne doit rien faire d'autre que tuer Rey, la pilleuse d'épave devenue Jedi - cette même Rey que sur le dernier bastion de la Résistance, la Générale Leia Organa forme autant qu'elle le peut car elle sait sa confrontation inévitable avec son fils dévoyé. Secondée par Finn, Poe, Chewbacca et C-3PO, la jeune femme va devoir embarquer à bord du Faucon Millenium pour une mission dangereuse à même de redéfinir en profondeur l'équilibre galactique, sa compréhension de la Force et même son identité...
Les oeuvres de Edmond Hamilton et en particulier son Univers des Rois des Etoiles constituent la matrice de Star Wars : il n'y manque en fait que la Force pour s'y trouver en terrain tout à fait connu ! De ce fait, un Star Wars est avant tout un space-opera très hamiltonien : même s'il est possible d'y trouver des influences variées pas toutes issues des œuvres de l'Âge d'Or - la présence répétée de planètes sableuses et munies de vers géants faisant volontiers référence à Dune - c'est le sense of wonder et la variété graphique d'une galaxie sans limites bien définies qui constituent le leitmotiv de la saga toute entière. L'Episode IX ne fait pas exception : bestiaire - dont un ver géant trilabié si familier qu'il constitue bel et bien une référence appuyée au Shai-Hulud ; voyages interstellaires ; vaisseaux géants... et souffle épique d'une intrigue à même de convoquer des personnages légendaires perçus comme plus grands qu'eux-mêmes par les véritables héros de l'histoire. Dans cet écrin visuel et sonore (voire tactile si l'on prend la peine d'aller voir ce film dans une salle 4DX) l'intrigue prend un certain sens, à savoir celui d'une quête pour terminer la guerre (car bien sûr, un Star Wars est toujours une histoire de conflit) mais aussi pour savoir qui est Rey, ce personnage énigmatique de toute la postlogie. Là où la prélogie péchait - aux yeux de ses détracteurs - par sa nature même de préquelle, au contraire la postlogie posait la question irrésolue des origines de cette jeune femme investie presque aussitôt du statut de héros. Un Star Wars étant toujours au fond une histoire de famille, il s'agissait de savoir en fait si Rey était apparentée d'une façon ou d'une autre aux Skywalker ou si elle était liée à l'un ou l'autre des personnages apparus ailleurs dans la saga. Il fallait donc s'attendre à une révélation conçue pour être massive : et en effet, le secret des origines de Rey surprend une fois découvert même si les circonstances de son annonce contribuent à ne pas en faire un contrepoint trop évident au célèbre Non, je suis ton père de Dark Vador.

Sommes-nous le produit de notre héritage génétique, celui de notre éducation ou d'un mélange subtil des deux ? Choisit-on d'être ce que l'on veut ou subit-on des choix faits par d'autres que nous ? La saga toute entière de Star Wars pose cette question sans y répondre tout à fait, cet Episode apportant de nouveaux éléments sur le chemin vers la Force qu'entreprennent Kylo Ren/Ben Skywalker et Rey. Tous deux portent un héritage lourd et contrarié : le premier porte le fardeau génétique de Dark Vador alors que la seconde refoule des souvenirs problématiques. Tous deux ont à faire des choix difficiles : d'un côté se trouve la facilité, celle d'un destin que d'autres ont dessiné ou celle de l'anachorèse... et de l'autre une tâche impossible en apparence et dont le coût s'annonce d'ores et déjà démesuré. Sur cette route, il n'y a pas de sens unique et des revirements sont possibles, conduisant à des avenirs alternatifs pas toujours irréalisés : la rédemption comme la chute restent par conséquent des options jusqu'au bout de la confrontation. C'est ainsi que, parfois, une famille d'adoption devient plus précieuse aux yeux de l'individu que sa famille biologique : dans cette opposition entre l'identité génétique et l'identité sociale se joue en fait la balance de l'acquis, de l'environnement et de l'inné. Dans ces conditions, le caractère précipité du voyage - où les personnages volent de monde en monde si vite qu'ils peuvent parfois se perdre de vue et même donner l'impression de se téléporter - a moins d'importance que la leçon qui le sous-tend : Finn était un stormtrooper, Rey une pilleuse d'épaves, Ben un Jedi failli et Poe un contrebandier... mais tous, à la lumière des événements qui les affectent, ont été ou sont amenés à remettre en question ce qu'ils sont à un moment donné de leurs vies. Dans ce passage de relais qui s'achève entre les héros de la première trilogie et ceux de la troisième, c'est au fond une dernière leçon qui est délivrée au spectateur comme aux personnages : l'avenir, même dans les moments les plus sombres, est toujours ouvert et susceptible de porter une amélioration à la situation actuelle - à condition, parfois, d'oser faire ce qui doit être fait.

De la sorte et sans être parfait - aucun Star Wars ne l'est de toute façon - l'Episode IX remplit son rôle. S'il n'éclaire peut-être pas les trois trilogies comme le phare qu'attendait une partie du public, il se révèle assez hamiltonien et intelligent pour apporter une conclusion non triviale à la saga - et même la propulser vers de nouveaux horizons... Merci.

Commentaires

Lhisbei a dit…
Je suis bien d'accord avec ton analyse.
Anudar a dit…
Merci ! J'attends la tienne en tout cas :)
Vert a dit…
Pour ma part j'ai plutôt été agréablement surprise. C'est bourré de défauts mais si on prend le parti d'accepter la direction prise on passe plutôt un bon moment. J'aurais aimé un peu plus d'originalité mais bon, ça sera peut-être pour une prochaine trilogie qui sait ^^.
Anudar a dit…
Voilà : aucun "Star Wars" n'est sans défaut, et chaque épisode mérite bien d'être vu pour lui-même. L'avenir est encore et toujours ouvert !