Millenium 1 : Les hommes qui n'aimaient pas les femmes

Il existe deux types d'adaptations de fictions littéraires au cinéma : celles où l'on lit le roman au préalable et celles où on le lit après coup. C'est une façon de dire que la lecture du roman et le fait de voir son adaptation au cinéma sont deux exercices différents, que l'on n'entreprend pas pour les mêmes raisons et qui n'ont pas les mêmes effets : le chemin vers une fiction est très personnel et donc, très subjectif. Par une commodité qui n'est que l'expression de ma paresse, je range la série des Millenium dans le genre "policier", ignorant quelle est au juste la différence entre cette désignation et celle du polar ou du thriller. Sans doute existe-t-il un distingo plus ou moins subtil, de la même façon qu'il en existe un entre space-opera et planet-opera, mais n'étant et de loin pas un spécialiste du "policier", je ne m'aventurerai pas à essayer de réaliser un classement plus fin de cette série de fiction que j'ai découverte cet Eté par son adaptation au cinéma, laquelle m'a plus ou moins décidé à rajouter le premier tome de la série dans ma pile de livres. Après l'avoir terminé la semaine dernière, il est temps pour moi d'en proposer une critique.

Millenium est, dans cet univers de fiction, le titre d'une revue économique assez critique à l'égard des liaisons dangereuses entre le capitalisme suédois et les journalistes économiques du pays. Mikael Blomkvist en est la figure de proue. Au début du livre, il se trouve plongé dans la tourmente suite à un procès en diffamation qu'il est en train de perdre contre un magnat des affaires, Hans-Erik Wennerström, ce qui remet en cause la réputation de sérieux de la revue Millenium. Décidant de prendre quelque distance avec la revue afin d'essayer de la sauver, Blomkvist saisit une opportunité proposée par Henrik Vanger : le très âgé ancien PDG du groupe Vanger souhaite le voir enquêter sur une disparition non résolue depuis les années 1960, celle de sa nièce Harriet. En contrepartie, Henrik Vanger lui offre une récompense considérable... ainsi que des informations qui, à ce qu'il raconte, permettraient à Blomskvist d'abattre Wennerström. Le journaliste se lance dans l'enquête avec quelque réticence, mais au fil des confidences de son vieil employeur il comprendra que la famille Vanger, propriétaire du groupe éponyme, traîne derrière elle bon nombre de souvenirs déplaisants, et que la disparition de Harriet est sans doute liée à un épouvantable secret. Afin de comprendre, il aura besoin de l'aide d'une jeune pirate informatique, Lisbeth Salander, aussi asociale que douée.

A la fin de l'enfance et pendant une partie de mon adolescence, j'ai lu plusieurs romans d'Agatha Christie et j'en étais resté sur l'idée que le lecteur d'un roman policier doit pouvoir être en mesure de résoudre l'énigme à la place des personnages de l'intrigue. J'ignore si ce principe est toujours valable dans la production policière actuelle et je ne saurais dire si, à ce titre, Les hommes qui n'aimaient pas les femmes est une exception anormale à cette règle ou bien s'il est en accord avec de nouveaux principes... Car j'ai gardé l'impression, même en ayant vu le film avant de lire le livre, qu'il n'est pas possible de résoudre l'énigme avant que les personnages ne le fassent. Les indices s'égrènent peu à peu et des fausses pistes apparaissent pour déjouer l'attention du lecteur, mais l'intrigue policière se dénoue en quelques pages juste après l'apparition des données décisives.

Mais peut-être que Millenium est une fausse série policière ? L'enquête sur la disparition de Harriet Vanger occupe la majeure partie du temps fictionnel, c'est vrai, mais le début et la fin du roman concernent surtout le combat de Blomkvist contre Wennerström. Les accents critiques de Stieg Larsson contre les patrons-voyous prennent alors une saveur toute particulière et l'on en vient à se demander si là ne serait pas le propos principal de l'auteur. A moins que cela ne soit de dénoncer les atteintes aux droits de la femme à travers les fils d'intrigue plus ou moins annexe qui traversent l'ensemble du roman ? Le talent de Stieg Larsson semble être de mélanger les genres afin de produire une oeuvre inhabituelle et fort prenante. Une oeuvre qui n'est pourtant pas sans défauts : l'écriture n'est pas toujours maîtrisée sans que l'on puisse à chaque fois rendre responsable la traduction. Les personnages ont "tous la même voix" et c'est sans conteste celle du narrateur. C'est un défaut assez fréquent et qui, s'il n'est pas très gênant, contribue à diminuer la saveur littéraire d'un livre sans pour autant suffire à le rendre illisible. Ni à diminuer l'intérêt potentiel de ses éventuelles suites.

Ce qui, dans l'ensemble, m'apparaît comme une raison suffisante pour ajouter Millenium 2 et 3 dans ma pile de livres, en espérant, cette fois-ci, pouvoir les lire avant leur adaptation au cinéma.

Commentaires

Guillaume44 a dit…
Ma copine a adoré la série, le film m'a bien plu (et ça m'a changé de la SF ^^).
Anudar a dit…
Oui en effet, ça change ! C'est aussi l'une des raisons pour lesquelles je vais continuer la série jusqu'au bout, ça permet de souffler :) !
Anonyme a dit…
j'ai trouvé les livres trop longs dans les descriptions le film bof!!!par contre la serie retrace bien les 3 histoires des livres et j'aime beaucoup
Anudar a dit…
Merci pour ton commentaire. Je suis en train de finir le troisième tome. N'hésite pas à revenir :) !
Anonyme a dit…
Je n'ai pas aimé du tout la trilogie (je n'ai pas vu les films) mais on me l'avait offerte, donc j'ai lu. Aucun des personnages ne m'a intéressée réellement et l'ensemble m'a paru artificiel.Les livres dits "nordiques" ne m'accrochent pas, sans doute suis-je trop habituée aux anglo-saxons ??!
Andrée
Anudar a dit…
Je suis moi-même très partagé... L'histoire est bluffante, mais l'écriture est plutôt plate. Pour moi c'est le genre de bouquin qui a bénéficié d'un bon lancement et à partir du moment où tout le monde voit des gens occupés à le lire, ça donne envie de savoir de quoi il retourne...
Sans doute que le phénomène Millenium a été un peu trop gonflé :) !

Au fait, tu as la possibilité de t'inscrire sur Blogger même sans écrire de blog. Cela te permet de te connecter une bonne fois pour toutes et d'éviter d'apparaître en "Anonyme". A moins que tu ne préfères comme ça, bien sûr.
Gromovar a dit…
Je déteste ce livre. Il a activé tout mes détecteurs de politiquement correct.

http://quoideneufsurmapile.blogspot.com/2007/10/une-enqutitude.html
Nico a dit…
J'avais beaucoup aimé ce roman, malgré quelques longueurs, surtout au début. J'ai pour ma part apprécié le style, que j'ai trouvé très efficace. Je l'avais lu quand il n'était pas encore un phénomène, c'est peut-être aussi pour cela que je l'ai tant apprécié. Après, j'aurais peut-être été plus déçu, ce qui arrive souvent quand on attend beaucoup de quelque chose.
Anudar a dit…
Bienvenue ici !

Je ne sais pas si j'attendais beaucoup de ce livre mais c'est vrai qu'on en a beaucoup parlé... Donc, le lire après la "vague" "Millenium" c'était aussi arriver après la bataille.