Le Hobbit : la Désolation de Smaug

On avait déjà parlé ici, l'année dernière, de l'adaptation cinématographique du Hobbit, le fameux roman jeunesse de J.R.R. Tolkien et surtout point de départ de l'intrigue du Seigneur des Anneaux. Le Hobbit version Peter Jackson se poursuit, donc, à travers ce deuxième volet (sur trois) : pour le film, je l'ai vu cet après-midi (et ce qui ne gâche rien, en excellente compagnie), pour la chronique, c'est sur le point d'être fait !
Résumé : 
Le répit de Gandalf, Bilbon, Thorin et sa compagnie de Nains a été de courte durée : les Orques de l'affreux Azog les pourchassent à travers toutes les terres sauvages. L'orque albinos a en effet juré de tuer Thorin, qui lui a jadis tranché un bras. Pour les Nains et leurs alliés, il va falloir trouver un abri : la protection du change-forme Beorn, qui n'aime pas les Nains mais déteste encore plus les Orques, leur donnera un nouveau répit et les amènera jusqu'à l'entrée d'une profonde forêt, celle par laquelle passe le chemin le plus direct vers Erebor, la Montagne Solitaire. Le temps presse en effet : le jour de Durin, où sera révélé l'emplacement de la porte secrète par laquelle Thorin espère pouvoir s'infiltrer au coeur de la Montagne à la barbe du dragon Smaug, est tout proche et le moindre détour interdirait d'arriver à temps. Le sentier à travers la forêt n'est pourtant pas le plus sûr. Au Nord, se trouve le royaume des Elfes sylvains dont le roi, Thranduil, pense pouvoir se tenir à l'écart du monde en fermant ses frontières et en chassant tous les intrus. Au Sud, se trouve Dol Guldur, tanière du Nécromancien, sorcier adepte de magie noire sous l'ombre duquel prospèrent Orques et autres créatures monstrueuses... Avec le départ de Gandalf, qui a compris que, peut-être, le plus important est d'identifier la véritable nature du Nécromancien, voilà que Bilbon et les Nains se retrouvent seuls dans une forêt hostile. Pourront-ils la traverser ? Arriveront-ils jusqu'à Erebor, là où les attendent peut-être la cruauté mais aussi la ruse de Smaug ?
Le premier volet de cette trilogie, sans être déplaisant, m'avait laissé un certain goût de remplissage. Il faut dire que tirer trois films d'un livre assez court ne peut se faire sans recourir à l'éventuel contexte dans lequel est plongé ce livre, voire même à l'invention : le travail de Tolkien ayant été ce qu'il a été, Jackson et son équipe ont eu la chance de s'appuyer sur un contexte abondant et, donc de privilégier celui-ci à l'invention. Celle-ci est néanmoins présente - et d'une façon manifeste - à travers le personnage capital - ben oui - de Tauriel. Ceux qui s'intéressent à l'actualité du tolkienverse ne peuvent avoir manqué l'insertion de ce personnage qui a fait couler beaucoup d'encre (virtuelle) et permis à moult trolls (virtuels aussi) d'enflammer pas mal de débats. On parlera donc de l'Elfe-femme (à moins qu'il ne faille dire femelle ?) pour commencer. Ainsi que le dit le Traqueur Stellaire dans son plaidoyer pour ce personnage (et tant qu'on en parle, allez donc voir sa chronique), Jackson a pris soin, dans son adaptation, de dépoussiérer une oeuvre parue quand même pour la première fois dans les années 1930 : on ne peut pas l'apprécier d'un côté pour l'avoir fait... et lui reprocher de l'autre de l'avoir fait à sa façon. Aberrant, le personnage de Tauriel ? Sans être un très fin connaisseur du tolkienverse (que je pratique tout de même depuis l'âge de onze ans... et j'ai une très, très, bonne mémoire...) je dois dire que ce personnage me paraît tout à fait conforme à l'image des rares personnages féminins de premier plan de l'oeuvre de celui que j'appellerais volontiers le Maître si je n'avais pas déjà décerné ce titre à Frank Herbert : de Galadriel (bien sûr) à Eowyn (bien sûr aussi) en passant par Luthien, mais aussi Varda/Elbereth dans une certaine mesure, les êtres féminins y sont très souvent intrépides, plus déterminés que les êtres masculins et, surtout, souvent de bien meilleurs remparts contre les ténèbres. Que Jackson ait introduit dans son film un personnage d'Elfe conforme à cette image - il faut songer, quand même, que Tauriel, bien que capitaine des gardes du royaume de Thranduil, ose s'opposer à son souverain ! - témoigne bel et bien d'une compréhension sans doute bien plus fine de l'oeuvre de Tolkien que ne voudraient le faire croire les fans les plus crasseux à travers leurs jérémiades.

Alors, à part Tauriel, que dire de ce film ? Eh bien, qu'il remplit assez bien son cahier des charges. On ne va pas voir le Hobbit parce que l'on a envie de voir un film de fantasy ou bien un film bourré d'effets spéciaux : on y va parce que l'on a envie de passer un bon moment devant une valeur sûre et parce que l'on sait qu'à la fin, les gentils s'en tireront en pas trop mauvaise santé. On pourrait, bien sûr, s'amuser (comme le fait très bien Odieux Connard dans son truculent spoil) à faire la liste des incohérences de l'intrigue du film, entre personnages qui semblent doués du don de téléportation, tonneaux qui apparaissent ou disparaissent par magie (alors que Gandalf se trouve à l'autre bout de la région au même moment) et autres pièces d'or qui échappent à une fouille approfondie (pourtant conduite par des Elfes, lesquels doivent bien avoir, outre l'oreille fine et les yeux ailleurs que dans leurs poches, des doigts un peu plus sensibles qu'un sabot de cheval). On pourrait aussi tenter de voir quelles incohérences ou bizarreries sont introduites par les nouveautés de Jackson dans l'intrigue de Tolkien - mais ça serait retomber dans le mauvais procès en légitimité qui a pu lui être intenté depuis la sortie de La Communauté de l'Anneau. Mais on doit tenter de se laisser porter par un film somme toute assez tonique, lequel parvient à se défaire des traits d'humour potache qui, à mon avis, gênaient quand même un peu dans le premier volet de cette trilogie. On doit surtout accepter le fait qu'adapter, c'est traduire, et donc trahir (un peu). On doit enfin, aussi, comprendre que Le Hobbit version Jackson est une préquelle de son Seigneur des Anneaux : tout, des ambiances (qu'il s'agisse de certains décors mais aussi des thèmes musicaux) jusqu'aux clins d'oeil (Legolas qui découvre un portrait de Gimli jeune et qui le qualifie d'orque mutant !) le rappelle. C'est en ce sens que les batailles chorégraphiées parfois jusqu'à l'invraisemblable (ah, Bombur et son tonneau-compresseur...) prennent une saveur jouissive : Le Hobbit version Tolkien était une oeuvre pour enfants, et une oeuvre plutôt gentille, qui n'avait pas encore la tonalité sérieuse du Seigneur des Anneaux. Et c'est sans doute à travers ces allusions dont certaines sont à tiroirs que Jackson rend son plus bel hommage à Tolkien : bravo !

Commentaires

Guillmot a dit…
On se rejoint sur le fond, même si j'ai plus de doutes au final sur ce film, je reste très fan de cette Tauriel. Une chose est sûre, j'aime beaucoup les personnages féminins de Peter Jackson ;)
Val a dit…
Vu que le premier épisode était raté, le second volet un peu mieux réussi, gageons que le dernier volet sera une réussite ! Tauriel est magnifique yes ! mais qu'est-ce qu'elle vient faire là ? c'est comme si à la base l'histoire manquait de piment ;-)
Anudar a dit…
Je suis plus enthousiaste que pour le premier, c'est clair.
Anudar a dit…
On va dire que l'espoir est permis pour le troisième. Tauriel sert surtout à justifier pas mal de scènes d'action sans lesquelles ce film serait, peut-être, un peu trop contemplatif pour le public actuel ?
Escrocgriffe a dit…
"On doit enfin, aussi, comprendre que Le Hobbit version Jackson est une préquelle de son Seigneur des Anneaux ».

Je pense malheureusement que c’est ce point précis qui pose problème, ce grand écart impossible entre les fans du conte pour enfants de Tolkien et ceux de Peter Jackson. Hélas...