Voyageur, Ω

La série Voyageur prend fin avec ce dernier volet où tous les fils d'intrigue sont rattachés les uns aux autres et où toutes les énigmes sont résolues. C'est l'occasion de retrouver une dernière fois les personnages récurrents, cette fois-ci sous le trait de Guarnido, le dessinateur de Blacksad.
Résumé :
Fish est mort dans l'arène, à Lutèce, ainsi que le destin le prescrivait. Déchiré, Lou emporte Issa, le maître gladiateur, vers le futur où il va devoir former les deux produits de l'ingénierie génétique de Louis Markovic : la fabrication de Vedder, le Voyageur, est en marche... A Paris, à l'époque actuelle, ce même Louis Markovic vient au monde : il est le fils de Lou/Vedder, et c'est aussi un orphelin de mère soumis aux tests ignobles de la cellule "voyageur", une officine barbouzarde nichée au coeur du pouvoir, déterminée à faire de lui le messie d'une époque nouvelle... Alors que la puissance des Etats s'effondre devant celle des multinationales et de la finance, le jeune Markovic, sauvé de la torture, va devoir être caché. Ceux qui l'ont adopté, pris à présent dans la nasse du destin, seront-ils les spectateurs de l'effondrement de leur monde - ou bien les acteurs de sa sauvegarde ?
L'intérêt de cette série, c'est l'existence de ces trois cycles (Futur, Présent, Passé) dont les intrigues permettent la compréhension globale de l'histoire. Après un cycle Passé en demi-teinte (car j'en vois mal, il faut bien le dire, la solidité globale), j'attendais beaucoup de cet épisode Ω qui était censé constituer une véritable clé de voûte pour l'ensemble de l'histoire. Première bonne surprise : le travail de Guarnido, un auteur dont j'ignorais le nom avant de découvrir Blacksad. C'est excellent : tout en restant fidèle aux choix graphiques des autres auteurs de la série, Garnido a su imposer sa patte à cet album qui gagne donc une véritable personnalité. Deuxième bonne surprise : on pouvait craindre que l'intrigue, chargée de faire converger tous les mystères de la série vers leur résolution, se révèle trop rapide et même ratée. Certes, c'est rapide. Mais ce n'est pas trop rapide : c'est tonique et il n'y a pas une case qui ne se justifie. Les auteurs parviennent de plus à introduire une réflexion philosophique : envoyer Vedder sur un autre monde et lui faire comprendre qu'il n'y a pas d'alternative, c'est nous faire saisir à nous que nous sommes bel et bien coincés sur notre planète et qu'il n'y en aura pas une autre quand nous aurons fini celle-là...

Ce n'est que dans les dernières pages que l'intérêt s'effrite un peu. Cette histoire de sauvetage in extremis, grâce à Juliane qui - comme on s'en doutait depuis pas mal d'albums - n'est autre que la fameuse Lili produite en même temps que Fish et Lou, n'a rien d'original. Vedder passe le relais et, d'une façon symbolique, l'épopée du Voyageur prend fin quelque part dans l'Antiquité, à l'époque des pyramides... Avec malgré tout une lueur d'espoir : alors que la guerre, dans le futur, a pris fin faute de munitions et peut-être même de combattants, il s'avère que Juliane/Lili n'a pas renoncé à garder un oeil sur les survivants. Et s'il y en a, c'est en soi une raison d'espérer.

Un album dont la partie centrale présente une véritable parenté avec notre époque actuelle, et qui représente - en fait - l'excellente conclusion que méritait toute cette série. Bravo !

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