Sentinelle

J'ai déjà chroniqué il y a quelques mois l'opus précédent de la série Complex. J'ignore s'il y aura une prochaine livraison (peut-être) mais  si Eden était orienté thriller, Sentinelle m'incite à utiliser en tout cas un autre libellé de ma longue liste...
Résumé : 
Aux Etats-Unis, une femme traumatisée par la destruction de l'immeuble où se trouvait sa fille en bas-âge, du fond de l'hôpital où elle était internée, a énuméré une très longue liste de noms au téléphone. Elle parlait à l'une des futures victimes des attentats du 11 Septembre, la veille même de sa mort dans l'effondrement des tours... et la liste ne correspondait à rien d'autre que celle des noms des personnes appelées à mourir puisque le coup de téléphone a été passé dans la journée du 10 ! Quelques années après, deux des policiers chargés d'exploiter les télécommunications ayant impliqué les tours avant les attentats découvrent l'apparente prophétie : de toute évidence, il faut retrouver Angela, son auteure... Mais pourquoi un magnat de la prédiction économique s'intéresse-t-il aussi à elle ? Pour Renzo Sensini, en vacances en Grèce après les terrifiants événements vécus en Suisse, n'y a-t-il pas la promesse d'une nouvelle rencontre avec l'homme étrange qu'il connaît sous le nom de Wadaïeff ? Et pourquoi une puissante société commerciale a-t-elle privatisé pour un moment le sanctuaire de Delphes, "nombril du monde antique", où jadis la Pythie délivrait-elle ses prophéties obscures et néanmoins toujours fiables ?
Le précédent volet de cette histoire ne m'avait guère convaincu. Moins S que F avec cette histoire bien peu crédible d'êtres humains chimères de végétal, et peu convaincante surtout à cause de la construction peu vraisemblable selon laquelle un homme seul (Renzo Sensini) parvient à faire tomber une organisation ayant survécu à la fin de la guerre froide. C'était distrayant mais guère mieux.

Sentinelle, en renonçant aux oripeaux du thriller pour adopter ceux du paranormal, parvient d'une façon surprenante à s'épargner ces difficultés de vraisemblance. A partir du moment où, dès le départ, sont posées les règles du jeu - dans le cadre de ce livre, le pouvoir de prophétie des Pythies et de leurs descendantes en lignée féminine était réel, et tant pis si, en vrai, la Pythie devait rester vierge - se laisser absorber par cette histoire ne pose aucune difficulté. Plus triviale, sans doute, est la motivation des différents personnages. Sensini n'apparaît tout compte fait pas comme le personnage principal de Sentinelle, mais parmi les autres il n'y a guère de volontaire apparent pour la reprise du flambeau, et l'on s'en sort - en fin de compte - avec une collection d'individus peut-être interchangeables. Sensini et le flic américain (Geoffrey) apparaissent tout compte fait comme les deux faces d'une même pièce. Quant aux méchants, dont les buts restent esquissés (à peine !) ils ne me sont pas apparus autre chose que réjouissants : pas assez hauts en couleur même si assez désagréables pour que l'on se réjouisse de leur déconfiture finale.

A mon sens, le principal intérêt de cette histoire, c'est encore le fameux Complex éponyme. A travers une société secrète dont les membres portent, en guise de pseudonyme, toute la rimbambelle des pronoms interrogatifs anglais (si je n'en ai pas manqué), les auteurs postulent l'existence d'une force occulte veillant à faire du monde un endroit plus sûr... pour elle-même. Un monde plus rationnel (au sens de rationalité en économie) peut-être ? Pour en être sûr, il faudra se pencher sur les éventuelles suites de ce qui n'est pour l'instant, à ma connaissance, qu'un diptyque. Encore faudra-t-il, pour cela, que le pitch de cet éventuel troisième opus m'agrée...

Commentaires