L'Algébriste

Banks n'a pas été souvent chroniqué sur ce blog. Par hasard, la dernière fois ce fut il y a quelques mois : la présente chronique s'intéresse à un space-opera indépendant de son Cycle de la Culture.
Résumé : 
Nasqueron est une géante gazeuse aux mains de l'énigmatique civilisations des Habitants. Ceux-ci, très anciens, très puissants, ont colonisé la plupart des planètes semblables à Nasqueron dans toute la Galaxie, et n'accordent pas beaucoup d'attention à leurs voisins... Fassin Taak est un Voyant, un être humain formé à la communication avec les Habitants : à l'intérieur du système de Nasqueron, la Mercatoria est menacée d'invasion par la culture hostile de l'Archimandrite Luseferous - or, depuis des siècles, son système est coupé du réseau de trous de ver et ne peut donc espérer aucun secours de la part de ses autres voisins... Alors, la Mercatoria l'envoie pour une dernière mission dans les couches de Nasqueron : il y trouvera peut-être la clé de la "Liste des Habitants", qui est censée ouvrir un réseau de trous de ver secret - et donc donner la clé de l'Univers. Mais comment arracher pareil secret à des êtres aussi indifférents que les Habitants ?
Comme souvent chez Banks, les concepts mis en oeuvre dans L'Algébriste sont de nature à fasciner. Il m'a été difficile de ne pas penser à l'Univers de Tiamat de Joan D. Vinge devant ce portrait d'une culture isolée d'une civilisation galactique par la perte d'un moyen de transport supra-luminique. Il m'a été impossible de ne pas penser aux impératifs du Jihad Butlérien lors de ces évocations d'une civilisation globale où les intelligences artificielles ont été bannies à jamais, contraintes à l'extinction - ou bien au mimétisme. Et puis, la culture des Habitants elle-même vaut son pesant d'or : des êtres capables de vivre des milliards d'années, sans aucune forme de gouvernement centralisé, tout entier tournés vers leurs propres objectifs, lesquels sont peu compréhensibles aux êtres humains. Il y avait donc là-dedans beaucoup de matière pour servir quelque chose de fascinant.

Et puis... ben, non. L'Algébriste ne décolle que dans ses toutes dernières pages. Avant cela, Banks passe d'un personnage à l'autre, d'un point de vue à l'autre, d'une époque à l'autre, sans trop suivre de fil directeur ni laisser flairer un schéma d'ensemble. On met donc pas loin de sept cents pages à voir un peu où il compte en venir. Quand à la résolution de l'énigme, en forme de pied de nez, il s'avère qu'à sa façon Asimov y avait déjà répondu dans les années 1950 ! Alors, quitte à piocher quelques bonnes idées dans les oeuvres de ses aîné(e)s, pourquoi donc Banks n'a-t-il pas fait le nécessaire pour en retirer aussi l'art de la fascination ?

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