Les blogueurs parlent aux blogueurs : Weirdaholic
Au début des années 2010, l'excellent Gromovar avait pris une initiative chaleureuse et passionnante : il s'agissait d'interviewer les blogueurs de ce qui était déjà le Planète-SF, réalisant ainsi une oeuvre de connaissance de la blogoSFFFère.
En ce début des années 2020, cette communauté a changé : des anciens sont partis, d'autres sont toujours là, et des nouveaux sont arrivés. Le moment, d'après moi, est revenu de faire le point et de nous interroger en tant que blogoSFFFère sur nos aspirations et nos liens communs. Avec la permission de Gromovar, inventeur du concept, je reprends par conséquent la rubrique Les blogueurs parlent aux blogueurs !
Et aujourd'hui, c'est au tour de Weirdaholic de nous parler de lui...
En ce début des années 2020, cette communauté a changé : des anciens sont partis, d'autres sont toujours là, et des nouveaux sont arrivés. Le moment, d'après moi, est revenu de faire le point et de nous interroger en tant que blogoSFFFère sur nos aspirations et nos liens communs. Avec la permission de Gromovar, inventeur du concept, je reprends par conséquent la rubrique Les blogueurs parlent aux blogueurs !
Et aujourd'hui, c'est au tour de Weirdaholic de nous parler de lui...
1. Bonjour, peux-tu te présenter en deux mots (tu peux être aussi bref que tu veux… jusqu’au néant)
Vu que je risque d'être long dans les autres réponses, je vais user ici de l'option « néant ». Pour me justifier, je déformerai une citation célèbre d'Hölderlin : « nous ne sommes rien, ce que nous lisons est tout ». (Mince, j'ai perdu du monde dès ma première réponse.)
2. Pourquoi avoir créé un blog ? Est-ce le premier ? Le seul ?
A l'origine (2012), je voulais garder une trace écrite des réflexions qui me venaient à l'esprit en lisant ou visionnant des œuvres ; mais comme je suivais l'actualité littéraire de moins près que maintenant, je me suis dit que j'allais me concentrer sur les films (c'était une époque où j'allais beaucoup au cinéma, y compris pour voir des trucs qui venaient tout juste de sortir). Je n'ai pas tenu longtemps comme ça, jusqu'en 2014 uniquement (je me fie aux archives de mon blog, je n'ai pas les dates dans la tête). Quand la pandémie de Covid-19 a frappé, nous poussant à repenser nos vies (c'est un gros cliché je sais, mais je l'ai vraiment vécu comme ça, pour des raisons trop longues à expliquer ici), je me suis rendu compte qu'à présent (2020) je lisais beaucoup plus d'ouvrages récents, donc que je pourrais très bien reprendre mon blog en parlant de livres ce coup-ci – j'hésitais encore un peu cependant, vu comment ma précédente tentative avait tourné court. C'est alors que le Chien critique a lancé un concours de la meilleure blague avec pour prix un exemplaire d'Au bal des absents de Catherine Dufour… J'ai arbitrairement décidé de participer, et de rouvrir mon blog (le même donc) avec la critique du roman si je gagnais – c'est ce qui s'est passé. (Ma blague mettait en scène Catherine Dufour elle-même et deux personnalités dont le nom salirait ces lignes ; elle figure en tête de la chronique.) Donc si la blogoSFFFère doit maintenant supporter mon affreux verbiage, c'est entièrement de la faute du Chien critique, moi je ne suis responsable de rien (dit-il en sifflotant).
3. Combien de temps y consacres-tu ?
Hou là ! pas mal de temps je pense, même en ne comptant pas le temps de lecture (bloguer allonge certainement le temps de lecture, vu que je prends un peu plus de notes qu'avant, où j'en prenais déjà beaucoup il est vrai). Il y a le temps de rédiger la chronique, le temps de lire ce que les autres avant moi ont écrit du livre (afin de signaler dans ma chronique mes points de convergence ou de divergence avec leur analyse, voir de la citer quand ils ont mieux formulé le truc que moi), le temps de réviser la chronique, le temps de chercher des liens ou des références pour telle ou telle envolée théorique… Je n'ai jamais vraiment chronométré, mais ça fait beaucoup, c'est sûr. (Au bout du compte, vu le temps que j'y consacre, je devrais peut-être songer à me reconvertir dans la critique littéraire.)
4. Blogues-tu tout ce que tu lis ?
Clairement non, notamment parce que je lis beaucoup trop de bandes dessinées pour les chroniquer toutes (et dans les ténèbres les lier). Il est vrai aussi que je suis moins sélectif sur les bandes dessinées que sur les romans, or je n'aime pas parler de quelque chose qui m'a moyennement convaincu ; par ailleurs, je suis sans doute moins à l'aise pour chroniquer une bande dessinée qu'un roman ou une novella, alors que ma culture graphique est certainement supérieure à ma culture romanesque, allez comprendre. Il y a également des textes que je lis ou que je relis (donc que j'apprécie), mais que je ne chronique pas faute de temps ou d'angle d'attaque convaincant, notamment des textes courts ; pour ceux-là, je sais que ce n'est que partie remise (par exemple, suite à une chronique de Gromovar sur La Muraille de Chine, j'ai relu récemment Dans la colonie pénitentiaire de Kafka ; un peu avant, j'avais lu L'Occupation des sols de Jean Echenoz, une sorte de Vertigo architectural).
5. As-tu déjà lu certains livres simplement parce que tu te disais que ça pourrait faire un article intéressant pour ton blog ?
Non, jamais. Déjà, je ne pourrais pas lire un ouvrage dont le style me déplairait (je pré-sélectionne ce que je lis sur ce critère). Ensuite, pour moi, le blog est clairement une sécrétion de mes lectures, pas l'inverse.
6. Lis-tu en VO ? Si oui, en quelles langues ?
Comme je suis beaucoup plus à l'aise avec l'anglais technique qu'avec l'anglais littéraire, je ne lis guère en VO anglaise que des webtoons et des articles, voire des essais (The Seven Beauties of Science Fiction d'Istvan Csicsery-Ronay est par exemple une des références que j'invoque le plus souvent sur mon blog, j'espère qu'il sera traduit un jour). La seule autre langue dans laquelle je me suis retrouvé à lire un essai (une sélection des chroniques de Dario Argento, beaucoup plus intéressantes que ses nouvelles, en ce qu'elles annoncent tout son cinéma), c'est l'italien, que j'arrive à déchiffrer sans l'avoir jamais appris (merci, le latin).
7. Blogues-tu avec ou sans roleplay ? Si c’est le cas, que représente ce roleplay pour toi ?
Est-ce que je suis aussi pédant dans la vraie vie que sur mon blog, tu veux dire ? En fait, les arguments que j'y expose ne sont pas très différents de ceux que je pourrais utiliser dans une discussion amicale (encore tout récemment, j'ai conseillé Le Livre écorné de ma vie de Shepard à quelqu'un qui me disait adorer Au cœur des ténèbres de Conrad) ; en revanche, c'est beaucoup plus fouillé sur mon blog, évidemment. De ce point de vue-là, aucun roleplay donc ; mais d'un autre côté, ces réflexions tissées autour d'un livre ne représentent qu'une partie de mes réactions à sa lecture : je laisse volontairement de côté l'aspect émotionnel, autant parce que je peux avoir du mal à l'appréhender (donc à le décrire) que parce qu'il peut aussi venir avec le temps (les livres ont un effet au-delà du temps de leur lecture, je ne sais pas si je suis clair). Dit autrement, ma critique vise en quelque sorte à rechercher les causes structurelles de l'état émotif où m'a plongé le livre ; et si j'y parviens, d'autres que moi doivent se retrouver dans ma chronique, y compris de façon inversée (par exemple, Gromovar disait sur le forum du Bélial' que ma chronique des Chants de Nüying d'Emilie Querbalec contenait toutes les raisons pour lesquelles il a détesté le livre, alors que moi je l'ai adoré, pour les mêmes raisons).
8. Depuis combien de temps lis-tu de la SFFF ?
Depuis que je sais lire, je pense, ou presque (voir la question 12) – un bon moment donc, mais j'ai quasiment tout oublié (hélas) de ce que j'ai lu dans ma prime jeunesse (ça me fait de quoi relire, tu me diras, mais vu la taille déjà haute de ma PAL…)
9. A quel rythme lis-tu ?
Vu que j'ai du mal à lire après une journée de travail (à part un article ou un épisode de webtoon), je consacre généralement mes week-ends (élargis, je travaille à temps partiel) et mes jours de congés à la lecture (je préfère qu'il y ait le moins d'intervalle possible entre deux parties d'un même livre). Je suis de toute façon incapable de tenir plus de quelques jours sans lire (c'est con à dire, mais j'en ai vraiment besoin pour mon équilibre mental).
10. Que trouves-tu dans nos littératures de genre ?
Ah, ça, c'est LA question, celle qui éclipse toutes les autres, et sur laquelle je pourrais disserter pendant des heures (retenez-moi). Pour te donner une réponse radicale (ça va m'éviter d'être trop long) : je pense que la littérature sans genre n'existe pas, de même que la littérature sans imaginaire. A partir du moment où l'on invente un seul détail d'un texte, on est déjà en train de proposer une variante alternative de la réalité, raison pour laquelle Ernst Bloch soutenait que la littérature est fondamentalement utopique (et qu'elle doit l'assumer pour perdurer). Quitte à réinventer la réalité don, pourquoi ne pas y aller frontalement et faire de la littérature dite « de genre » ? De toute façon, ce n'est qu'en instaurant une certaine distance (pour ne pas dire une distance certaine) avec la réalité qu'on pourra vraiment la questionner (on ne peut comparer que deux choses vraiment dissemblables, ou pour le dire autrement, il faut une différence de potentiel pour créer un arc électrique). Autrement dit, je pense que les seules littératures à vraiment saisir l'air du temps (donc le destin funèbre qui attend l'espèce humaine), ce sont les littératures de l'imaginaire – ou sinon pourquoi tout le monde se mettrait d'un coup à en faire ? Si tu veux disséquer le réel, quoi de mieux que le scalpel de l'imaginaire ?
11. Partages-tu cette passion avec ton entourage ?
Tout dépend de l'étendue que tu donnes au terme « entourage ». Si tu le limites à la famille, pas vraiment (ma sœur est plutôt polar, et ma mère, plutôt albums jeunesse, ce qui nous fait dans les deux cas des sujets de discussion, vu que je lis aussi dans ces deux catégories à l'occasion). Si tu comprends les amies proches, oui, un peu – il y a d'ailleurs au moins deux billets de blog où je « crédite » une amie bibliothécaire pour ses judicieux conseils, La Bibliothèque de Mount Char et Magica. (Il y en a eu d'autres, mais je ne les ai pas forcément chroniqués.)
12. Quelle a été ta première lecture SFFF ? Te souviens-tu de l’occasion qui t’a amené à cette lecture ?
A bien y réfléchir, je me demande si ma première lecture SFFF n'est pas l'album Panini de Jayce et les conquérants de la lumière, où il y avait quelques bonnes idées, comme les monstroplantes (certains grandissent en lisant Joyce, et d'autres, en lisant Jayce, c'est la vie). D'ailleurs cet univers (assez classique avec le recul) m'avait tant impressionné que je l'avais choisi pour cadre d'une peinture de gosse, qui a longtemps décoré la salle à manger de mes parents, aux côtés d'un château peint par ma sœur. Si ce n'était pas ça, c'était un roman des Conquérants de l'impossible de Philippe Ebly, ou un de la série L'Androïde de Seth McEvoy, voire une bande dessinée de Yoko Tsuno, de Valérian et Laureline, de Blake et Mortimer ou du Vagabond des limbes – autant d'ouvrages qui, avec les livres dont vous êtes le héros, ont façonné l'imaginaire de beaucoup de monde, moi y compris donc. Ah, il y a aussi une BD peu connue mais très marquante quand on la lit jeune, Le Chêne du rêveur. Dans tous les cas, il n'y avait pas vraiment d'occasion il me semble (en même temps, j'ai une mauvaise mémoire épisodique), mais une envie de dévorer tout ce que je trouvais à lire (ma mère m'avait toujours lu des histoires, j'imagine que ça explique en partie ma passion de gosse pour la lecture).
13. Peux-tu nous décrire un (ou plus) grand souvenir de SFFF ?
Je peux toujours te citer, en vrac, un ou deux ouvrages qui m'ont impressionné alors même que je connaissais déjà leur auteur ou autrice (le Ça de Stephen King, l'Outrage et rébellion de Catherine Dufour, Les Chants de Nüying d'Emilie Querbalec) ou bien qui me l'ont fait découvrir de façon magistrale (le Serpentine de Mélanie Fazi, La Horde du contrevent d'Alain Damasio, Léopard noir, loup rouge de Marlon James). NB : ce ne sont ni des lectures de jeunesse (j'ai tout oublié ou presque, comme j'ai dit en 8), ni des lectures trop récentes (pour ne pas empiéter sur la question suivante).
14. Quel est le livre qui t’a le plus marqué récemment ? (Répondre sans réfléchir)
Sans hésiter La Sonde et la Taille de Laurent Mantese, pour lequel le terme « marqué » est des plus appropriés… (Certains passages te font presque mal physiquement.) C'est aussi un bouquin qu'on lira encore dans cinquante ans, enfin s'il reste encore des humains à ce moment-là.
15. Vers quelle étiquette SF, F, ou F, va ta préférence ? Et pourquoi ?
C'est le moment de sortir une autre citation célèbre, de Musset ce coup-ci : « Qu'importe le flacon, pourvu qu'on ait l'ivresse ? » Bon, il y a sans doute une certaine vision de l'homme fort et conquérant (qu'on peut trouver en SF ou en fantasy classique) qui m'agace ; mais il suffit qu'elle soit mise à mal (et elle l'est souvent dans la SF ou la fantasy actuelle) pour que ça commence à m'intéresser… Même si mon autrice préférée (voir la question 17) fait du fantastique, je suis tout autant intéressé par la SF, y compris hard, que par la fantasy, surtout celle dite de crapules. En fait, tant que l'ouvrage est bien écrit, je suivrai son auteur ou son autrice n'importe où (cela explique sans doute pourquoi je suis plus indulgent avec Alain Damasio que certains, même si je n'hésite pas à le défier sur le terrain des idées, voir ma chronique de sa Vallée du silicium).
16. Comment ont évolué tes goûts entre tes débuts en SFFF et aujourd’hui ?
Comme tu as pu le deviner au vu de mes premières lectures, j'étais plutôt aventures au départ, qu'elles soient fantastiques, scientifiques ou policières : j'étais donc amateur de Sherlock Holmes, qui réunissait un peu les trois ; mais j'ai aussi lu, en vrac, de l'Asimov, du Clarke, de l'Herbert, du Tolkien, du Van Vogt – et des tas d'autres auteurs de Présences du futur dont j'ai tout oublié. À la fin de mon adolescence, juste avant d'avoir un problème avec la lecture (bande dessinée exceptée), j'étais beaucoup plus orienté polar ; mais quand je me suis mis à relire vraiment, c'était plutôt du fantastique (celui promu par Alain Dorémieux, incluant donc ce type de science-fiction qui flirte ouvertement avec le fantastique, comme les nouvelles de Richard Matheson, le Solaris de Lem ou Les Coucous de Midwich de Wyndham) ; puis je me suis aussi mis (ou plutôt remis) à la fantasy jeunesse (qui en fait est très mature quand c'est Philip Pullman ou Diana Wynne Jones qui l'écrivent). Au bout du compte, je me suis mis à suivre d'un peu plus près l'actualité littéraire (comme je te disais dans la question 2), donc à lire sans doute un peu plus de science-fiction (puisque c'est plus ou moins le genre dominant, même si la fantasy est apparemment en train de faire son grand retour).
17. Quels sont tes auteurs préférés ? Pourquoi ?
Il y a beaucoup d'auteurs et d'autrices que je suis de près ou de loin (ou que je suivais un temps, voir la question 19), mais il y en a une avec qui j'ai vraiment une relation particulière (sans la connaître le moins du monde, ni URL ni IRL, je précise), ou plutôt dont l'œuvre m'a accompagné dans les moments-clés de ma vie, c'est Mélanie Fazi. J'ai toujours eu une affinité particulière avec ses textes, avant même de savoir que la vie qu'ils reflétaient ressemblaient par certains côtés à la mienne (nous sommes tous deux des collectionneurs de spectres, comme elle dit joliment). En dehors de ça, c'est quelqu'un qui a écrit certaines des plus belles phrases de la littérature de l'imaginaire – j'en connais une ou deux par cœur. « La cité travestie ne dort jamais. Ses insomnies sont contagieuses. » Je tuerais pour avoir écrit ça (il y a trop d'humains sur Terre de toute façon, et pas assez de belles phrases).
18. Y a-t-il des livres que tu regrettes d’avoir lu (temps perdu) ? D’autres que tu aurais regretté de ne pas voir lus ?
Je pense avoir appris des trucs même des lectures « anecdotiques », donc aucun regret sur ce plan-là ; en revanche, il y a plein de livres que je veux lire et qui s'entassent sur ma PAL… Il y a aussi des livres dont je ne comprends pas vraiment pourquoi ils ne trouvent pas leur public (il paraît que c'est le cas des Mille saisons de Léo Henry).
19. Y a-t-il des auteurs dont tu lis tout (ou voudrais pouvoir tout lire) ?
Il y a en effet des auteurs et autrices dont je sais, généralement pour en avoir lu plusieurs titres, que leur prochain (ou leur plus ancien) ouvrage va forcément m'intéresser d'une façon ou d'une autre (quelques-uns de ces noms sont déjà apparus dans cette page, Mélanie Fazi, Alain Damasio, Emilie Querbalec, Léo Henry, Antoine Volodine, Marlon James, mais il y a aussi les Kloetzer, Pierre Cendors, Léo Kennel, Jean Krug, luvan, Lucien Raphmaj, Michael Roch, Greg Egan, Caitlin R. Kiernan, Claire North, Alastair Reynolds, Colson Whitehead, Tom Sweterlitsch ou Peter Watts, et j'en oublie sans doute, pardon) : je sais par exemple que je vais finir par lire un de ces jours Les Nuits sans Kim Sauvage de Sabrina Calvo et Les Champs de la lune de Catherine Dufour. Corollairement, il y a des auteurs et autrices dont j'ai adoré un roman, mais dont je ne suis pas sûr du tout que le précédent ou le suivant m'intéressera (je pense notamment à Quentin Leclerc, Romain Lucazeau ou Audrey Pleynet, et à ces trois grands romans que sont Saccage, La Nuit du faune et Rossignol, mais aussi à Marguerite Imbert et ses déjantés Flibustiers de la mer chimique). ou à Clément Bouhélier et son terrifiant Pacte de sang). Entre les deux, il y a tous ces auteurs et autrices sur lesquel.le.s je ne suis pas encore totalement fixé, y compris parce que je me remets à les (re)lire après une longue période passée à les ignorer, à tort (en ce moment, c'est typiquement le cas d'Adam-Troy Castro et de Thomas Day, mais aussi de Laurent Queyssi).
20. Vas-tu voir les auteurs sur les salons ? Ramènes-tu des interviews, des photos, des dédicaces ?
Je ne suis pas très à l'aise dans la foule et le bruit, et ça ne s'arrange pas avec le temps ; donc non, je ne cours pas les salons, surtout que je ne saurais pas vraiment quoi dire aux auteurs et autrices que je rencontrerais, à part des banalités. Ceci dit, il y a aussi quelques personnes du milieu de l'imaginaire que j'aimerais bien rencontrer dans la vraie vie, après avoir échangé avec elles en ligne ; donc je finirai sans doute par assister un jour à une séance de dédicaces (avant de la fin de l'année j'espère).
21. Que penses-tu de l’œuvre de Bernard Werber ? Et de celle de Maxime Chattam ?
Puisque tu as prononcé le nom de ces deux créatures maléfiques… Bernard Werber (que j'ai mis en scène dans la blague que j'évoquais plus haut), j'ai lu il y a longtemps (sans doute en diagonale, je ne me souviens plus) Les Fourmis, qui doit sans doute son succès à son concept (mon père avait apprécié, alors qu'il était de base amateur de polars et de romans historiques) plus qu'à son style (les parties au passé simple sont plus que quelconques, je viens de revérifier par acquit de conscience). Depuis je ne crois pas avoir ouvert un de ses livres sans avoir envie de le fermer aussitôt (il faut dire aussi que j'ai beaucoup écouté la Salle 101 à une époque, et les jingles avec les déclarations stupides de Werber, ça n'aide pas à le prendre au sérieux.) Maxime Chattam, j'ai lu un de ses romans policiers il y a un moment déjà – la fin était ratée, mais le style allait encore, dans mon souvenir, sans que ça me donne envie de recommencer… J'ai perdu définitivement toute estime pour son travail un jour où, dans un train, je jetais un coup d’œil sur la liseuse de ma voisine (je sais, c'est mal, mais c'est instructif, la preuve). J'ai trouvé les phrases tellement mauvaises (de vrais contre-exemples pour manuel d'écriture créative) que j'ai cherché sur un célèbre site internet d'extraits de livres quel pouvait être leur auteur (ou leur autrice) : c'était un des volumes de fantasy signés par Chattam… (Attends quelques secondes pour la suite, je me rince la bouche.)
22. Tes fournisseurs : librairies, bouquinistes, Internet ?
Ma politique actuelle en matière de livres est (avec quelques exceptions) d'emprunter les bandes dessinées et d'acheter le reste, donc mes fournisseurs principaux sont ma bibliothèque et ma librairie de quartier, ainsi bien sûr que les éditeurs et éditrices qui me font suffisamment confiance pour m'adresser des services de presse (je les remercie, au passage). Sur internet, je n'achète guère que sur Charybde et surtout sur Scylla (qui a un gros stock de livres de SFFF aujourd'hui introuvables).
23. BD, comics, mangas, ou non ?
Complètement ! J'ai découvert ces trois grandes catégories dans l'ordre où tu les présentes (tu pourrais d'ailleurs y rajouter les webtoons). Aujourd'hui encore, je lis des trois, mais avec des restrictions (plus vraiment de comics mainstream ou de shôjô ni de hentai). Là aussi, il y a des créateurs que j'ai chroniqué plus fréquemment que d'autres, notamment Timothé Le Boucher, Ted Naifeh, Ed Brubaker, James Tynion IV, Atsushi Kaneko ou Gou Tanabe. (mais ça ne reflète pas forcément l'étendue de mes lectures, voir la question 4)
24. Lis-tu aussi de la littérature « blanche » ? Si oui, qui aimes-tu particulièrement parmi les auteurs étiquetés « blanche » ?
Je lis en effet des auteurs et autrices paru.e.s dans des collections dites « blanches », mais qui publient de l'imaginaire de façon plus ou moins déguisée (typiquement, la collection Terres d'Amérique). Autrement dit, pour moi, il s'agit toujours d'imaginaire ! (Voir aussi la question 10.) De ce point de vue-là, un des auteurs contemporains les plus intéressants est clairement Marlon James (Brève histoire de sept meurtres, Léopard noir, loup rouge) – il y a quelques années, je t'aurais sans doute dit Haruki Murakami, mais ça fait un moment que je n'en ai pas lu. Il y a aussi Volodine et ses hétéronymes, bien sûr… Dans les auteurs morts, tu as évidemment Borgès ou Kafka, mais aussi Alain Robbe-Grillet, qui contrairement à sa réputation (infondée) est tout sauf un réaliste, voir ses œuvres des années 60-70 (La Maison de rendez-vous, Projet pour une révolution à New York, Topologie d'une cité fantôme, Souvenirs du triangle d'or).
25. Tentative de Weltanschauung : qu’aimes-tu comme musique ? Comme cinéma ? Quel est ton loisir favori ? Plutôt matérialiste ou idéaliste ?
Pour la musique, j'ai été élevé à Brassens (mon père) et Beethoven (ma mère), donc je garde aujourd'hui encore un certain intérêt pour la chanson à texte et la musique classique – mention spéciale à Léo Ferré, le seul à avoir réellement réussi la fusion des deux. Ajoute à ça le post-punk au sens large, y compris autant Nirvana que ce genre qu'une amie à moi appelle la musique pour garçons dépressifs, avec Nick Cave en étendard (oui, je suis un caviste, j'avoue). Pour le cinéma, un petit coup d’œil sur les débuts de mon blog (2012-2014) t'apprendra (sans surprise) que j'aime le cinéma de genre (y compris le film noir, le western ou le film d'arts martiaux). En revanche, pour des tas de (mauvaises) raisons, je n'ai plus vu un film en salle depuis 2020 (et Vivarium) ; mais je n'ai pas pour autant réussi à me mettre au DVD (ça va venir un jour). Pour le loisir, mis à part la lecture… Ah si, je fais des mots fléchés le matin, pour vérifier l'état de mon cerveau ; le midi, j'essaie souvent de résoudre un ou deux problèmes de backgammon ; et le soir, je joue parfois aux échecs à l'aveugle contre moi-même pour m'endormir (je suis sûr de n'être jamais maté, comme ça). Pour « matérialiste » ou « idéaliste », tout dépend dans quel sens tu prends ces termes (oui, je sais, je suis un pinailleur dans l'âme). Dans leur acception philosophique, je suis clairement un matérialiste, autrement dit quelqu'un qui croit que la pensée découle de la matière, et non l'inverse. Dans leur acception commune, je suis en revanche un idéaliste : je ne crois pas que la vie devrait se résumer à accumuler sans fin des biens matériels, surtout que nous vivons dans un monde fini (dans tous les sens du terme).
26. As-tu une liseuse ? Quel est ton rapport à la lecture numérique ?
Non, aucune liseuse (je suis un peu de l'école « e-book, immonde »). En fait, je suis à peu près incapable de lire en numérique, notamment parce que je prends des notes à même les romans (et je te passe mes problèmes de vue). J'ai réussi à faire des exceptions pour certaines bandes dessinées (sur lesquelles je ne griffonne pas quand je lis en papier), mais c'est tout – si un éditeur m'envoie un SP numérique, je dois l'imprimer pour pouvoir le lire, donc je fais ça uniquement pour des textes courts.
27. Quel est ton rapport à Internet ? Connecté depuis longtemps ? Quel est ton rapport aux réseaux sociaux ?
En fait, je fais probablement partie des premières personnes à s'être connectées régulièrement au net, grâce à l'option cybercafé d'une salle de cinéma parisienne (chez moi, je n'ai eu le net que très tard) ; en revanche, malgré mes affinités avec le concept, je n'ai participé que tardivement à l'internet post-Minitel des premiers temps, celui des forums et de l'anonymat (j'ai beaucoup fréquenté le forum d'un célèbre site de fact-checking, bien avant et un peu après son passage sur les réseaux sociaux). Tu l'auras sans doute deviné au vu de ce qui précède, je n'apprécie vraiment ni la real name policy, ni l'organisation en réseau autour d'une personne (privée ou publique) plutôt qu'autour d'un sujet (comme sur les forums), ni les prises de position (transphobes ou xénophobes) de certains milliardaires possédant ces réseaux. J'ai sans doute tort (ça doit aider à promouvoir un blog), mais je ne suis ni sur Facebook, ni sur Twitter (enfin X), ni sur Instagram – j'y viendrai sûrement un jour, ceci dit. En revanche, je suis sur Babélio (pour les opérations Masse critique et pour mettre tout de même un peu en avant mes chroniques), et aussi sur Discord (que j'utilise uniquement comme une messagerie instantanée, et encore, je préfère l'e-mail).
28. As-tu des projets d’écriture de fiction, ou est-ce que tu en as eu par le passé ?
(Avertissement : la lecture des lignes suivantes est susceptible de provoquer des dommages cardiaux irréversibles à toute personne occupant des fonctions éditoriales.) « Projets » est un bien grand mot, mais oui, mes tiroirs virtuels sont plein de textes courts ou longs, achevés ou non. Pour les nouvelles, certaines d'entre elles (pas forcément les plus représentatives) ont été publiées dans des revues ou anthologies (voir ma page nooSFère pour plus de détails, même s'il y manque encore mes deux prochaines publications) – je fais encore illusion quand la distance est courte. Pour les romans, en revanche… Je crains bien que la plupart soient impubliables, autant pour des raisons de forme que de fond. Imagine par exemple un remake « soft » du Suspiria d'Argento dans une ville française imaginaire avec, entre autres, des poupées vaudous en serviettes périodiques… (N'allez pas dire que vous n'étiez pas prévenu.e.s.)
29. Sans y répondre, quelle question aurais-tu aimé que je te pose ?
« Quelle est la couleur de la terre que tu veux ? » (Alain Damasio, Les Furtifs)
30. Une dernière chose à dire au lectorat en délire ?
Heu… Il ne doit plus rester grand-monde, à ce stade, si ? Félicitation d'avoir tenu le coup jusque-là ! et rendez-vous au prochain épisodes des « blogueurs parlent aux blogueurs » avec, je l'espère, quelqu'un de moins bavard que moi.
Commentaires
(s) ta d loi du cine, "squatter" chez dasola