Europa tome 1 - La lune de glace

La bande formée par Leo, Rodolphe et Janjetov a déjà eu l'occasion de passer sur ce blog : à travers Centaurus, une... pentalogie space-opera mâtinée d'horreur, dont les premiers développements m'avaient convaincu plus que les derniers. La couverture d'Europa, en librairie, est défigurée par un sticker "Par les auteurs de Centaurus" : de mémoire, la dernière case du tome 5 de cette série évoquait bel et bien le projet Europa, laissant à penser que les deux pourraient être liés. L'avenir dira bien comment la bande s'y sera prise...
Résumé : 
Europa : le satellite de glace de Jupiter, abrite une forme de vie abondante qui a justifié l'installation d'une station scientifique à sa surface. Or depuis peu, les communications sont interrompues suite à d'inquiétants messages, laissant à penser que certains membres de l'expédition n'ont plus toute leur raison... Pour Suzanne Saint-Loup, pilote de vaisseau de son état, c'est l'opportunité d'un voyage interplanétaire puisqu'on la convoque au CESS en compagnie de ses futurs compagnons d'équipage. Aussitôt ou presque, des tensions se font sentir au sein de celui-ci, des tensions qui ne feront qu'aller grandissant jusqu'à l'arrivée sur Europa. Quels dangers menacent l'homme sur la lune de glace ? Et quels complots se trament dans l'ombre même des cercles religieux sur Terre ?
Le goût de Leo est connu pour les intrigues inquiétantes où les énigmes extraterrestres sont compliquées par l'attitude rétrograde de certains dirigeants humains, dont la perspective n'est souvent pas à la mesure des enjeux du contact avec une intelligence différente. Sans surprise donc, on trouvera dans Europa des réminiscences de Centaurus mais aussi des Mondes d'Aldébaran : le monde extraterrestre exploré ici s'annonce dangereux pour des raisons encore mal spécifiées, tandis que des assassinats ciblés sur Terre impliquent des groupes religieux dont les objectifs sont encore mal définis. Le trait, signé Janjetov, va bien entendu augmenter la parenté de cette série avec Centaurus même si - à découvrir une Terre encore viable et même florissante - on comprend qu'Europa est destinée à en être une préquelle. Il ne sera bien entendu pas possible à ce stade de préciser les liens entre les deux séries même si l'on peut d'ores et déjà formuler l'hypothèse que quelque désastre survenu au cours de la mission vers Europe nécessitera ensuite l'évacuation de la Terre. A la place, on observera la façon dont les auteurs prennent soin d'introduire au premier plan un personnage atteinte d'un trouble du spectre autistique : on se souviendra du rôle tenu par une jeune aveugle dans Centaurus, et l'on comprendra que le statut du handicap et son acceptation sociale constitue l'un des sujets de la série toute entière - ce dont on ne peut que se réjouir puisque ce n'est pas si fréquent en BD générale.

En dehors de cette dimension si intéressante qu'elle soit, ce premier volume d'Europa ne parvient pas à convaincre tout à fait. Il n'est pas manqué - cela nécessiterait quelques efforts pour manquer un volume d'exposition, et le lecteur habitué à la plume de Leo & cie pourra s'agacer des réminiscences évoquées plus haut, mais la réelle faiblesse provient en réalité du caractère convenu de l'intrigue. Le personnage de la pilote est desservi par ses faire-valoir un peu trop archétypaux : commandant alcoolique, bourru et excentrique ; militaires antipathiques ; scientifiques énigmatiques ou ronchons... Le récit d'horreur qui promet de poindre derrière l'enquête sur Europa est parasité par le fait que certaines informations capitales sont lâchées comme autant de bombes au fil du texte : ainsi la pesanteur à la surface d'Europa est-elle identique à celle de la Terre malgré la plus petite taille de la lune, anomalie physique inexpliquée dont les personnages ne se formalisent pas. Quant à l'exploration de cette plage sous la glace d'Europa, elle est entreprise en bras de chemise puisque l'environnement semble tout à fait compatible avec la vie humaine ! Qu'on est loin ici du 2061 d'Arthur C. Clarke, ou même du film Europa report, où les dangers multiples d'Europe étaient évoqués avec le plus grand soin... A lire cet album, on se dit en fait que ce qui lui fait défaut c'est peut-être une réelle envie de convaincre : parfois, les meilleurs jouets ne sont pas les plus beaux...

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