The Annihilation Score

Suite immédiate à The Rhesus Chart, The Annihilation Score s'inscrit dans l'univers de la Laverie de Charles Stross. Ce cycle contient de jolis morceaux d'horreur et d'humour anglais, ce qui explique bien volontiers l'intérêt que j'y porte...
Résumé :
Dominique O'Brien (alias Mo), philosophe et violoniste, est une employée des services secrets paranormaux de Sa Majesté : on lui a confié un violon fait d'os humains, dont elle peut tirer des mélodies à même de violer la trame de la réalité - mais aussi de tuer les démons et les entités étrangères qui rôdent à la lisière du monde observable. Pourtant, sa dernière mission est pour le moins inhabituelle même selon les critères de la Laverie... Un peu partout, des gens acquièrent par hasard des superpouvoirs et certains se changent en super-héros. On demande alors à Mo, déjà épuisée par son travail et craignant d'avoir à se séparer de son mari, de construire la première agence super-héroïque de Grande Bretagne, afin d'en canaliser les membres dans le cadre de la loi. Or, qui dit super-héros dit aussi super-vilains... Qui est l'inquiétant Docteur Freudstein, capable de s'infiltrer au coeur de la Banque d'Angleterre et d'une centrale nucléaire ? Et pourquoi l'inquiétant violon de Mo se permet-il de venir la troubler jusque dans ses rêves ?
Dans les précédents épisodes, Bob - le mari de Mo - tenait la vedette. The Rhesus Chart nous le montrait aux prises avec un nid de vampires et aux conséquences de leur intégration - contrainte et forcée - à la Laverie. Ce livre se terminait par une confrontation entre Bob et Mo, devenus tous deux plus que ce qu'ils étaient au moment de leur mariage... De ce fait, Bob est presque absent de The Annihilation Score, par monts et par vaux afin de réparer le désordre lié à l'invasion des locaux de la Laverie. Mo devient donc l'héroïne de cette histoire, un choix intéressant : au contraire des apparences, elle n'est en rien une femme fragile, et son violon en fait en réalité un des personnages les plus dangereux au sein de cet univers.

La voilà pourtant propulsée dans un univers qu'elle maîtrise mal : diriger une agence super-héroïque n'est pas une sinécure, même lorsque l'on a la chance d'être appuyée par une experte ès ressources humaines. Semaines de soixante-dix heures de travail, mises au grill par des responsables politiques, interventions mouvementées sur le terrain, le tout sur fond de divorce probable et de CASE NIGHTMARE GREEN - cette menace cosmique selon laquelle, dans un avenir proche, de très puissantes entités vont s'intéresser d'un peu trop près à notre planète et à notre espèce humaine. Autant dire que Mo ne va pas bien et finit par avoir quelques difficultés à maintenir son bon discernement, une fragilité inattendue de la part de ce personnage : dans le tandem qu'elle forme (formait) avec Bob, il apparaissait depuis le début de la série comme le plus fragile.

Quel dommage, dans ces conditions, que tant de pages de ce roman soient consacrées aux affaires de coeur qui viennent perturber Mo ! La cohabitation avec Bob devient difficile dans la mesure où le violon d'os de Mo se montre jaloux - si l'on peut dire... Et avec son absence prolongée, le champ est libre pour que Mo - devenue le Docteur O'Brien ! - se laisse plus ou moins séduire par le premier bellâtre en uniforme de policier, lui-même super-héros sous le masque. Cette intrigue sentimentale, rattachée à l'intrigue principale sur la fin d'une façon quelque peu artificielle, m'apparaît comme un peu trop convenue et me rappellerait (presque) le piteux Une Affaire de Famille du même Stross. Qu'il est dommage de voir ce développement bien superflu grignoter le temps fictionnel et contraindre l'auteur à conclure son histoire en moins de vingt pages ! Et pourtant, que cette fin est brillante ! C'est là tout le talent de Stross, qui maîtrise son sujet assez bien pour ne pas manquer sa conclusion malgré un développement peu intéressant. On admettra tout à fait qu'il s'agissait d'une tentative de renouvellement : cela mérite bien d'être salué, malgré l'effet en demi-teinte...

Commentaires