Noô tome 2 : Subral

Second volume de la trilogie Noô adaptée depuis le livre de Stefan Wul par Laurent Genefort, Subral fait suite à Soror dont je parlais il y a quelques mois...
Résumé : 
La fuite, pour Brice et Jouve, se poursuit à travers une nature toujours plus dangereuse. Les soldats du Réal sont tout proches et si les rebelles ne sont pas sans alliés, ils vont devoir traverser une zone noô-active : quoi que cette substance huileuse puisse être, elle peut happer les esprits et rendre fous ceux qui succomberaient à son pouvoir... Et la route, après ce territoire hostile, comportera bien d'autres dangers. De l'autre côté de la mer, se trouve le bastion des insurgés où l'un des vieux amis de Jouve n'attend que son mentor pour conduire la révolution à son terme : le gouvernement du Réal, coupable de crimes odieux, va-t-il enfin tomber ? Soror va-t-elle goûter à la liberté que Jouve Deméril a théorisée ?
Soror est l'un de ces mondes étranges dont Stefan Wul avait le secret : créatures sentientes et environnement hostile constituent les motifs les plus évidents de son oeuvre. Arrivé près de vingt ans après sa première période d'activité littéraire, Noô témoignait d'une science-fiction familière bien qu'enrichie d'une dimension supplémentaire : la planète Soror souffrait sous le joug d'une dictature aux accents totalitaires... et Jouve Deméril, voyageur de l'espace exilé sur Terre, n'y revenait qu'en catimini pour reprendre ses activités subversives. Dans ce récit picaresque, Brice - le fils adoptif de Jouve - se laissait porter d'un continent puis d'un monde à l'autre, jamais tout à fait oublieux de la Terre de son enfance et donc sans réelles attaches : le récit de Noô conduisait donc le lecteur de l'émerveillement à la perplexité devant le comportement souvent étonnant du narrateur. Le premier volume de cette adaptation s'intéressait à l'arrivée sur Soror et aux premières étapes de la révolution : le second se donne un second jalon, qu'il serait dommage de dévoiler ici par respect pour ceux qui - n'ayant pas lu le livre - ne savent pas à quoi s'attendre... et se propose de faire découvrir à Brice que son impuissance face au gouvernement se double d'une autre, celle que l'homme éprouve quand il est confronté à son propre destin. Les amis, sur Soror comme sur Terre, finissent d'une façon ou d'une autre par être séparés parfois pour toujours.

A lire Subral, on se dit qu'il est bien difficile d'adapter Noô ! Les paysages de Soror sont magnifiques, ses habitants - oiseaux intelligents et insectes à l'eusociété consciente - convainquent et le voyage est donc beau. Hélas, le texte de Stefan Wul était par moments elliptique : en reprenant ce défaut et en l'amplifiant, cette BD se fait peu accessible pour le lecteur néophyte, à tel point que l'on se demande parfois - comme on le faisait déjà au terme de la lecture du premier tome - si le projet n'est pas celui d'un "objet-compagnon" au roman... Quant au lecteur familier de l'oeuvre écrite, il pourra par moments s'intriguer de l'absence remarquée de quelques péripéties, écartées sans doute pour des raisons de synthèse. Au fond, c'est le caractère picaresque de Noô qui est le mieux respecté dans cette adaptation : Brice a la bougeotte - après tout, il est pourchassé - donc Brice voyage en fusée, à pied, en bateau... et à travers des paysages et des cultures étranges qui modifient sa perception du monde. Là où le texte wulien faisait raconter l'histoire à la première personne, l'insertion de Brice dans les cases de cette BD empêche toutefois l'un des effets que l'auteur du roman recherchait peut-être : une expérience immersive dans un imaginaire déroutant et dérangeant...

Le dernier tome d'une trilogie est celui de tous les dangers, car c'est le moment où la série toute entière doit sortir de l'ambiguïté : la responsabilité de Candida - prochaine itération de la BD Noô -  est donc immense.

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