Kenya tome 1

J'ai commencé il y a quelques temps à chroniquer la série (Kenya) de Leo et Rodolphe à travers son cycle Amazonie en cours de publication : j'avais suivi (en librairie) les parutions des premiers cycles de cette série et, à la faveur d'une visite chez mon libraire d'occasion préféré, j'ai pu m'en procurer les deux premiers tomes d'un coup. L'occasion était belle d'en parler enfin ici...
Résumé : 
Kenya, mai 1947 : Katherine Austin débarque à Mombasa pour venir enseigner aux élèves d'un collège huppé. Deux de ses collègues, Merlin et Fuchs - professeurs de français et d'allemand - lui réservent un accueil très souriant voire presque dérangeant... surtout dans la mesure où Kathy est une espionne sous couverture, que les services secrets britanniques ont envoyée au Kenya pour enquêter sur la mystérieuse disparition d'un safari. L'époque est à la folie des soucoupes volantes : ces phénomènes inexpliqués semblent se manifester de plus en plus souvent à proximité du Kilimandjaro. Y a-t-il un lien entre les OVNI et les mystérieuses créatures que les indigènes ont pu entrevoir dans la brousse ?
La fin de la seconde guerre mondiale en 1945 a rebattu en profondeur les cartes géopolitiques. L'abaissement de l'Europe a été pour ainsi dire consommé, libérant un espace à l'orgueilleux pouvoir capitaliste des Etats-Unis mais surtout au titan soviétique, révélé au monde lors de sa victoire sans appel sur les ruines du "Reich de mille ans". Ce n'est qu'aux frontières de la sphère d'influence européenne, au plus profond des colonies les plus éloignées de leurs métropoles, que subsiste encore un peu de l'ancien monde : voici l'ambiance qui attend Kathy au Kenya, celle d'une vie intemporelle où le bien-être de l'homme blanc est construit sur le labeur souvent peu qualifié, souvent rébarbatif et souvent dangereux de l'homme noir ; une ambiance torride et moite, propice à la langueur, au badinage et au mépris qu'il est de bon ton d'exprimer face à la vie spirituelle de ces "autres" exploités en contrepartie des "bienfaits" dont ils ont été soi-disant comblés par les colons venus d'outre-mer... Kathy est une femme de son temps, le Kenya n'est jamais qu'une pierre précieuse parmi d'autres de la couronne britannique et peu importe que le monde ait été redéfini deux ans plus tôt à peine : soucoupes volantes ou non, c'est toujours le bon vieux temps des colonies. Et ses deux collègues - lesquels ne sont peut-être pas de simples professeurs, qui sait ? - ne crachent pas non plus sur le bon temps...

Le temps, c'est ce qui aurait tendance à s'étirer un peu en longueur dans cet album auquel, en tant que premier d'une série, revient il est vrai la responsabilité de l'exposition : c'est l'occasion du premier contact à faire avec ce monde où des bestioles préhistoriques font leur apparition dans la brousse, où des soucoupes volantes font voir leurs inquiétantes lumières et où un excentrique vit dans un palais d'architecture néoclassique à quelques encablures du Kilimandjaro... Premier contact à faire surtout avec des personnages typés, dont les relations s'organisent assez vite, et parmi lesquels s'impose aussitôt celui de Kathy : on sait à quel point Leo apprécie les personnages féminins forts et c'est sans surprise que le lecteur attentif saura capturer sur le visage de Kathy - au détour d'une case - un sourire qui semble être le jumeau de celui de Kim des Les Mondes d'Aldébaran. Par chance, la psychologie de Kathy semble différer assez de celle de Kim si bien que Kenya s'affirme d'emblée comme un univers très différent de celui des Mondes d'Aldébaran : c'est par sa rareté, dans un paysage qui semble inchangé depuis des milliers sinon des millions d'années, que l'étrangeté se fait effroi ; c'est par le silence des hommes - ceux qui savent se taisent -  et non par le seul fait incompréhensible que le mystère se fait menace. Kenya est donc une série qui s'annonce donc peuplée de monstres : si leur identité ne peut pour le moment pas être définie, gageons que certains d'entre eux auront figure humaine...

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