Übel Blatt tome 10

Avec cet article, je conclus mes rétro-chroniques d'Übel Blatt : la soudure est faite avec celle du tome 11 par laquelle j'avais démarré mon travail de présentation de la série sur ce blog.
Résumé : 
A Jebr, les yeux se tournent vers le ciel : toute la flotte du Marquis Lebellond survole la contrée alors que son armée entière franchit les frontières. Le Marquis et ses enfants savent que le "rebelle tueur de héros" se trouve à Jebr et ils vont concentrer toutes leurs forces pour le piéger... quitte à en recourir aux menaces les plus ignobles pour contraindre les potentats locaux à la coopération ! Au même moment, ce sont des retrouvailles inattendues pour Köinzell : Jebr était autrefois le fief de Kfer... et la veuve de celui-ci, que le semi-elfe a rencontré lorsqu'il était encore Ascheriit, est toujours en vie. Le chemin de vengeance de Köinzell met désormais le Marquis sur sa route : pourra-t-il sauver Jebr tout en éliminant son ennemi ? Mais Lebellond, cela signifie maintenant Ikfes - et l'ancien chevalier-esclave est devenu plus fort que jamais...
Comme annoncé dans ma précédente rétro-chronique, Übel Blatt est entrée dans un second cycle qui s'annonce plutôt centré sur l'élimination de la cible qu'est Lebellond. Sans surprise, le Marquis - que précède sa réputation de cruauté - trône en majesté à bord de sa nef de guerre, accompagné par ses enfants : l'ambition colossale de ce personnage est mise en avant avec efficacité au commencement même de ce volume. Le chantage qu'il exerce sur les habitants de Jebr n'est pas sans faire penser aux méthodes Lannister voire Harkonnen : il est tout à fait digne d'un personnage sûr de son bon droit et dévoré d'ambition. Pourtant, il caractérise aussi un personnage au fond fragile et tout aussi contraint dans ses actes par son passé que les "Héros" éliminés par Köinzell. Alors que s'égrènent les heures de son ultimatum implacable, Lebellond découvre que ses méthodes ne font pas l'unanimité, y compris parmi ses alliés objectifs : quelle que soit l'issue de la confrontation qui s'annonce, quel qu'en soit le prix pour lui et pour les autres, il aura témoigné de ses fragilités intérieures.

Moins cliniques et peut-être moins convaincantes sont les scènes qui suivent le chemin de Köinzell. Si la rencontre avec la veuve de Kfer est nécessaire aux développements de l'intrigue, l'intermède forestier n'apporte a priori pas grand-chose : tout au plus permet-il de préciser le contexte d'un monde où l'être humain doit côtoyer des créatures magiques, anciennes ou élémentaires, sans pour autant le faire d'une façon éclairante ou définitive, à tel point que l'on comprend que là encore l'auteur prépare un événement futur - mais sans que l'on puisse pour le moment l'interpréter de quelque façon que ce soit. Très attendue en revanche est la confrontation entre Köinzell et Ikfes : l'ancien chevalier-esclave dévoile ici ses motivations à tuer le "rebelle tueur de héros". A nouveau, Übel Blatt s'affirme donc en tant que tragédie : le destin de Köinzell/Ascheriit est tout aussi contraint que celui d'Ikfes, et pour des raisons similaires... Si l'un des deux devait mourir de la main de l'autre, alors le destin aurait désigné un perdant - mais aucun des deux n'en a l'âme, comme en témoigne l'une des dernières images de ce volume. Übel Blatt est toutefois trop bien pensée pour en finir ainsi : dans ce contexte, le deus ex machina auquel recourt l'auteur pour dénouer cette situation inextricable est tout à fait acceptable.

Ce volume est celui avec lequel, pendant plus de deux ans, la série s'est interrompue : l'auteur abandonnait ses lecteurs sur un véritable cliffhanger. A-t-il eu besoin d'un peu plus de temps pour penser la suite ? Ou bien s'est-il désintéressé de cette oeuvre pour un temps ? Le fait est qu'Übel Blatt a repris depuis comme en témoignent mes autres chroniques... Et j'en suis ravi, car il m'aurait déplu que l'épopée de Köinzell se termine ainsi à Jebr !

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