Übel Blatt tome 23

Voici enfin la fin du voyage pour Übel Blatt : la série d'Etorouji Shiono atteint sa conclusion ! Dix ans après l'avoir commencée, il est temps pour moi d'en tourner la dernière page...
Résumé : 
Les alliés de Glenn, y compris Ischüdien ressuscité en monstruosité tout droit sortie de Wischtech, sont stupéfaits : le loyal Rosen a tourné casaque et il prend parti pour la cause de Köinzell/Ascheriit ! Alors que la bataille au sol commence à tourner mal pour les forces impériales, Elsaria parvient à rameuter l'ultime carré des survivants et à mettre en oeuvre la tactique de la dernière chance... Parviendra-t-elle à offrir assez de temps à Köinzell ? Celui-ci va-t-il achever enfin sa quête vengeresse ? Et surtout... y a-t-il encore un espoir pour l'Empire de Sahrandien ?
Conclure une saga de Fantasy, même si sa construction annonce la nature douce-amère de sa fin, requiert un talent de narration consommé : il convient d'expliquer quels personnages survivront, de dire quels héros devront être sacrifiés pour accomplir le but commun et de justifier comment les antagonistes vont disparaître... Übel Blatt est un récit cruel qui n'a épargné ni ses personnages, ni son lecteur, et sans doute pas non plus son auteur - on rappellera que la publication a subi une interruption de deux ans : un hiatus qui a eu lieu entre les tomes 10 et 11. Apocalyptique, ce tome 23 se devait donc de l'être : les amateurs du genre ne seront pas déçus car Etorouji Shiono réserve à son lecteur ses plus belles fresques de combats dantesques. Personnages aux corps et aux visages distendus et distordus, explosions, étendues de corps sans vie, répugnantes résurrections et ruines immenses... il ne manque ici aucun élément du répertoire constitué depuis dix ans, et aucun personnage survivant au début de ce tome ne manque d'être cité à un moment ou à un autre pour jouer le rôle qu'il doit tenir dans la conclusion de l'intrigue. On aura donc l'occasion de faire ses adieux à tous ceux qui, au cours de la quête, ont eu des raisons d'y intervenir.

Le lecteur s'en doute bien depuis longtemps, la quête entamée dans le tome 0 (eh oui) sera menée à son terme : les pseudo-Sept Héros vont être éliminés par Köinzell et Glenn sera le dernier d'entre eux à rencontrer son destin. L'auteur d'Übel Blatt a eu toutefois l'intelligence de mêler à son histoire de vengeance une intrigue plus vaste et d'y associer une profonde réflexion sur l'humanité. Köinzell doit-il survivre à sa quête ? Si Übel Blatt n'est qu'une épopée de folle vengeance, il n'est pas nécessaire d'aller plus loin et la mort constitue la récompense finale au terme des souffrances consenties... mais s'il s'agit d'un roman d'apprentissage, alors Köinzell doit survivre et apprendre à vivre dans le monde nouveau qu'il a contribué à construire. Dans ce dernier tome si riche en combats et si pauvre en révélations - elles ont en réalité toutes été déjà faites - l'auteur trouve le temps de distiller ses dernières leçons. Pourquoi, au fond, Glenn a-t-il décidé de commettre l'irréparable et de trahir ses quatre compagnons plus courageux que lui lors de la précédente guerre ? Et pourquoi ensuite a-t-il choisi de se vouer corps et âme aux arts magiques interdits de Wischtech ? La condition humaine telle que Glenn l'envisage est insatisfaisante : l'être humain est faible, et sa faiblesse le conduit à l'incapacité, ce qui implique de prendre le contrôle de son destin en renonçant à sa propre humanité... Quant à Köinzell et à la plupart de ses amis, tous ont été retranchés à l'humanité d'une façon ou d'une autre - mais aspirent malgré tout à transformer le monde plutôt que les autres afin de prendre le contrôle de leurs destins. Transformer le monde ou transformer l'humanité ? Derrière cette question se trouve en fait la morale d'Übel Blatt : l'être humain a son mot à dire quant à son propre destin.

Eblouissant, ce dernier tome fournit donc à la série la conclusion qu'elle méritait : les très belles dernières pages en forme d'épilogue montrent que résoudre certains problèmes ne suffit pas - mais que les Héros, les vrais, ne renoncent jamais à transformer le monde... Bravo, et merci.

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