Escape from Yokai Land - Charles Stross

Le Cycle de la Laverie signé Charles Stross poursuit son extension : l'auteur laisse toutefois de côté ses personnages habituels, pour des raisons littéraires qui se justifient mais qui peuvent décevoir ses vieux lecteurs. C'est d'ailleurs mon cas : j'ai lu Dead Lies dreaming et Quantum of Nightmares, mais sans toutefois désirer les chroniquer. Le présent texte (assez court pour être qualifié en anglais de novella) reprend le personnage de Bob - historique dans la série - et s'insère dans la continuité du reste entre The Nightmare Stacks et The Delirium Brief.
Résumé : 
Pas de vacances ni d'anniversaire de mariage pour Bob : ses supérieurs l'envoient en détachement au Japon, où l'agence paranormale nationale a réclamé l'assistance de James Angleton. Son ancien supérieur hiérarchique étant décédé, c'est à Bob qui a hérité de ses pouvoirs d'aller honorer la requête japonaise. Quels périls vont le guetter sur place ? Et surtout : sera-t-il en mesure d'éviter un cataclysme au pays des kaiju ? 
Le Japon n'est pas que le pays du kawai et des mangas : c'est aussi une civilisation ancienne, à l'imaginaire marqué par une tradition spirituelle syncrétique, où les autels shintoïstes rappellent que pour les Japonais le divin et le sacré se trouvent partout. Bob, habitué aux manifestations paranormales frappées au coin de l'imaginaire occidental et chrétien - où le sacré s'incarne surtout dans les gestes du prêtre et dans la congrégation elle-même, va donc devoir se familiariser avec d'autres intrusions extra-dimensionnelles. Elles possèdent toutefois un dénominateur commun avec ce qui lui est familier : les formes de l'horreur peuvent diverger, mais pas la façon dont elles agissent ; donner du crédit à leur présence - soit donc, y croire - en renforce la puissance. Et comme c'était le cas dans Overtime (dont j'ai lié ma chronique juste avant), y a-t-il plus efficace qu'une croyance d'enfant ?

Le parc d'attraction visité par un Bob dubitatif recèle donc la promesse d'une horreur toute strosséenne : celle où le cute - pardon, le kawai - est une promesse de trash débridé. Le danger, bien sûr, c'est qu'en cas d'échec Bob aurait à faire face à rien de moins qu'un kaiju - soit donc, un monstre géant du genre Godzilla, mais de couleur rose - et déterminé à faire du monde un endroit heureux et paisible... sans doute en dévorant tout ce qui vit sur Terre. Stross joue à la fois de la pop-culture japonaise tout en nous donnant à voir de nouvelles mésaventures de Bob : il nous prouve donc sa capacité à se renouveler. Le seul défaut de cet Escape from Yokai Land, c'est bien sûr d'être trop court et donc de ne pas permettre à Bob de faire face longtemps aux tracas des relations sociales codifiées du Japon... Mais il n'en reste pas moins que c'est un excellent amuse-bouche, qui donne à espérer que Charles Stross n'en a pas fini avec son personnage !

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