Return Blessing - Raymund Eich

Sauf erreur, ce texte - au titre pouvant se traduire par Rendre bénédiction - est le premier qu'il me soit donné de lire de Raymund Eich. Il est paru dans le numéro de Septembre/Octobre 2022 de la revue Analog.
Résumé : 
Jeffrey, en séjour sur Valoduria aux frais de son père sous le prétexte de photographie, découvre un jour qu'un membre de l'espèce indigène s'intéresse de près à lui. L'extraterrestre lui réclame avec insistance de "rendre bénédiction" ! Jeffrey comprend des propos nébuleux de son interlocuteur qu'il a reçu quelque bénédiction - peut-être sous la forme de ce chapeau bizarre qui peut lui avoir donné une irritation à l'entrejambe après qu'il l'ait porté à cet emplacement suite à une soirée arrosée, ou sous celle de n'importe quel autre de ces objets que les indigènes offrent plus ou moins de force aux visiteurs humains - et qu'il est censé la rendre. Mais, de toute évidence, les extraterrestres n'attendent pas de simples paroles en contrepartie de leur propre "bénédiction"...
Des extraterrestres insectoïdes (avec yeux composés de rigueur), un malentendu (à ce qu'il semble), un être humain qui commence à craindre pour sa vie sur une terre étrangère et de l'humour : voici un texte qui aurait pu être publié dans Analog il y a cinquante ans, ou bien dans la Grande Anthologie de la SF, sans choquer pour autant ses premiers lecteurs ! On est ici dans le sense of wonder tout droit sorti de l'Âge d'Or de la SF : celui où les possibles amusaient avant de faire peur - ou bien, lorsqu'ils faisaient peur, c'était surtout pour éveiller le frisson rétrospectif une fois le danger passé. Jeffrey, caricature de gosse de riche parti à l'étranger pour faire la fête sous un prétexte fallacieux, ne s'intéresse pas aux autochtones et ne s'interroge pas quant à leurs actions - sauf lorsqu'ils commencent à se comporter de façon inquiétante voire menaçante, bien sûr.

La parabole biblique du fils prodigue nécessite, pour être comprise, d'admettre que le repentir est un chemin de rédemption tout aussi valable - ou peut-être même plus encore - que la conduite vertueuse. Cet élément, cité en conclusion de ce texte, permet d'éclairer à retardement le propos de l'auteur : qu'est-ce qui conduit Jeffrey à se repentir et à retourner auprès de son père, qui représente la sécurité du foyer, sinon la peur que lui inspirent les extraterrestres de Valoduria ? L'énergie qu'il dépense avant cela pour satisfaire à la demande ("rendre bénédiction", pour mémoire...) et les résultats surprenants de sa démarche montrent bien que Jeffrey, en bon fils prodigue, se fourvoie du début jusqu'à la fin. Le lecteur s'en doute : malgré sa mésaventure, son père l'attend sur Terre... les bras ouverts, et pour cause. Bravo !

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