Luxley tome 3 - Le sang de Paris

Troisième volet de la série Luxley, cet album promet depuis sa couverture d'être moins contemplatif que les deux premiers...
Résumé : 
Vucub-Noh a subi un très sérieux revers : les rebelles conduits par Robin Luxley, le roi Louis VIII et le pape Innocent III ont bousculé sa garnison et repris la ville de Paris ! Assiégé dans sa citadelle du Louvre, le gouverneur inca en est réduit à l'humiliante attente d'une armée de secours... A l'Ouest, l'Inca dépêche une troupe aérienne dirigée par sa propre petite fille, la terrifiante Cusi Koyllor. Luxley le sait, les murs de Paris que Vucub-Noh avait achevés ne suffiront peut-être pas à faire la différence... Il faudra, pour équilibrer le jeu dangereux, trouver des mages chrétiens capables d'obscurcir la vision des devins ennemis. Alors qu'il doit sans cesse augmenter les doses du peyotl qui lui permet de dissimuler ses plans à Vucub-Noh, Luxley commence à perdre prise... Paris pourra-t-elle être sauvée ?
Le second tome de cette histoire montrait comment les méthodes classiques redevenaient utiles quand s'opposaient des adversaires tous deux prescients : il s'agit maintenant d'aller au bout de l'exploration des conséquences liées à cette aptitude - et de montrer comment la prescience finit par se changer en piège. Devenu Inquisiteur, Luxley s'abrutit de peyotl pour deux raisons : il s'agit bien sûr de continuer à boucher la vue de son ennemi... mais aussi de dénicher parmi ses alliés des devins pouvant l'appuyer ou même le suppléer. Le jeu en vaut la chandelle mais il est risqué : tout comme Paul Atréides finissait par se perdre dans sa propre vision, Luxley risque bel et bien d'y laisser sa raison. Autour de lui, ses alliés sont de plus en plus inquiets : ils savent quant à eux que le combat ne se joue pas que dans la sphère spirituelle et apprécieraient que leur chef se tienne de temps en temps à leurs côtés... L'ambiance de cet album est donc trouble et le succès remporté avant son début semble bien fragile et même tout à fait menacé.

La menace va s'incarner à travers la princesse Cusi Koyllor. La scénariste imagine que les magiciennes Inca ne disposent pas d'un talent de prescience mais plutôt de psychokinésie : face à elles, pas de carte magique à opposer... si bien qu'à nouveau, la force militaire et la tactique redeviennent des éléments à prendre en considération. Mais si les chefs de guerre européens sont habitués à certaines techniques de combat, les assauts aériens de leurs ennemis sont trop inédits pour pouvoir être pris en compte avec efficacité. Si les flèches et la ténacité peuvent permettre de conquérir quelques succès d'estime, la maîtrise de l'air dont l'adversaire fait preuve implique un changement de paradigme dont les alliés de Luxley ne sont peut-être pas capables. Dans le même temps, les envahisseurs sont quant à eux prompts à se couler dans des paradigmes qui leur sont peut-être étrangers : la reproduction tenait lieu, à l'époque, de continuation de la politique par d'autres moyens comme c'était le cas pour la guerre ! On retrouve donc ici quelque chose de l'équation qui fit dans notre Histoire le malheur des Américains précolombiens : les conquérants européens venaient armés d'idées autant que de techniques...

En se concluant sur des images de génocide qui justifient son titre, cet album n'oublie pas de lever le voile sur l'une de ses premières énigmes : qui est au fond cet esprit qui hante les visions de Vucub-Noh ? La réponse à cette question s'avère plus mystérieuse encore et laisse à penser que le schéma d'ensemble de la série est plus convoluté qu'on n'aurait pu le penser au départ. La leçon de l'album, pourtant, reste belle : des causes analogues produiront des effets similaires - et le sang de Paris éponyme rappelle bel et bien le martyre de Tenochtitlan...

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