Touchdown

Deuxième nouvelle du recueil Danses aériennes de Nancy Kress, Touchdown est elle aussi un space-opera (ou plutôt un near space-opera, comme j'aurais envie de le préciser).
Résumé : 
La Terre n'est plus, ses villes sont en ruines, mais l'espèce humaine n'a pas renoncé. Sur la Lune, plusieurs colonies sont à couteaux tirés ; en orbite autour de la planète à présent inhabitable, prospèrent des stations orbitales dont le sport favori est l'identification des ruines terriennes. Une équipe engagée dans une compétition très serrée va-t-elle réussir un touchdown, c'est-à-dire, la rare extraction d'un artefact historique au sol contaminé de la Terre ?
L'ambiance de cette nouvelle, au contraire des premières apparences, n'est a priori pas post-apocalyptique. Si le contexte international - intersatellitaire ! - est tendu, avec la guerre qui menace entre les stations lunaires, les protagonistes que l'on croise ici ne sont pas le moins du monde inquiets de leur avenir : après tout, ils savent que leurs stations orbitales ne sont pas menacées d'une crise de folie guerrière puisque leurs ancêtres ont été sélectionnés en ce sens-là par la sociologie et par la génétique. La compétition est donc limitée au cadre inoffensif de l'exploration des vestiges humains sur Terre qui prend la forme d'un jeu : cette post-humanité, si elle est augmentée par la technologie, doit ses propriétés fondamentales à l'éducation et à l'héritage culturel. Quand aux derniers êtres humains à l'ancienne, ils sont de toute façon condamnés : déjà éteints - ceux de la Terre - ou promis à la disparition - ceux de la Lune.

C'est sur ce point-là que Touchdown se fait ambiguë et dérangeante : alors que les compétiteurs de l'inoffensif jeu d'exploration se voient contraints à envisager un coup des plus risqués pour arracher la victoire, sur la Lune se joue rien de moins que la dernière de toutes les guerres de l'espèce humaine. Mais pas de panique pour Cazie (la narratrice) et ses amis : les orbitales n'ont jamais été menacées par ce nouveau conflit, et le jeu peut continuer quoi qu'il arrive. C'est avec tout autant de froid détachement que Cazie, après avoir accompli son extraordinaire victoire par touchdown, considère la Lune comme un nouveau terrain de jeu potentiel. Ainsi, la Terre n'est plus, ses villes sont ruinées... mais peut-être que l'espèce humaine elle-même a disparu tout compte fait - à moins que ses derniers représentants aient perdu tout intérêt pour leurs frères et sœurs arriérés. Touchdown en ressort donc comme un texte distillant le malaise : l'indifférence de l'Univers à l'égard de l'espèce humaine, déjà évoquée dans Le Sauveur, y prend la déplaisante saveur du cynisme...

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