Ose

De Philip José Farmer, j'ai lu il y a un longtemps (une dizaine d'années) Le Monde du Fleuve, une série difficile à classer, qui se passe sur un monde étranger où toutes les personnes mortes reviennent à la vie un beau jour. Série fascinante qui m'avait occupé pendant plusieurs jours. Je n'y étais cependant pas revenu par la suite. Ose, un autre de ses livres parmi les plus connus, traîne dans ma PàL pourtant depuis fort longtemps. L'édition dont je dispose n'est pas récente car en fait ce livre est à mon père. La couverture, de Philip Caza, est plutôt belle et je me suis surpris à y revenir à maintes reprises au cours de la lecture...
Résumé :
Les Arras ont jadis transporté, à plusieurs reprises, des êtres humains sur la planète Ose afin d'en faire des animaux familiers doués d'intelligence. Plusieurs siècles plus tard, alors que leurs maîtres ont quitté la planète suite à une guerre interstellaire, la situation est très tendue entre les êtres humains et les horstels, d'autres familiers des Arras. Dirigés par une Eglise xénophobe, affamés à cause du manque de terres cultivables, certains fomentent l'extermination des horstels qui sont considérés comme des bêtes parlantes. Jack Cage, un jeune fermier, se trouve partagé entre son devoir vis-à-vis de ses frères de race et l'affection grandissante qu'il éprouve pour R'li, une femelle horstel du même âge que lui...
Planet-op' très bien caractérisé, Ose part de plusieurs postulats intéressants dont certains évoquent ceux du Monde du Fleuve. Une planète où des extraterrestres perçus comme "supérieurs" ont installé (sans trop leur demander leur avis) des populations intelligentes récoltées ailleurs. Un monde où la technologie est maintenue à son niveau le plus bas par manque de métaux. Des rivalités qui s'exacerbent entre les êtres humains à cause de leurs croyances, de leur rapport au monde... et de leur volonté, malgré tout, à développer une technologie avancée.

Du fait du court temps fictionnel dont il dispose dans ce roman, l'auteur ne parvient cependant pas à transformer son planet-op' en véritable livre-univers. Le personnage de Jack, découvrant peu à peu les secrets de son propre monde, apparaît comme fade et peu capable de nous guider sur la planète Ose, dont la géographie n'est guère explicitée. Certaines populations intelligentes ne sont que citées, si bien que l'on en voit guère l'intérêt. La profondeur philosophique de la cohabitation entre l'espèce humaine et les horstels n'est guère exploitée, pas plus que celle de la subsistance, dans l'ombre, de l'ordre des sorcières qui résistent à la foi chrétienne.

C'est le problème de ce livre, qui, à trop concentrer d'éléments dignes d'intérêt, finit par les survoler. Le temps fictionnel semble même s'accélérer sur la fin et, pour terminer de gâcher un livre qui démarrait si bien, il ne manquait plus qu'une seule chose : la conclusion-bateau... Laquelle est torchée en deux pages. Pour un personnage central qui n'évolue pas, tout compte fait, tout au long du livre, c'est à la fois beaucoup et pas assez. Dommage !

Commentaires

Patrice a dit…
C'est marrant mais voilà justement ce que je reproche au lectorat actuel: vouloir absolument tout savoir, si les fourmis locales ont bien 6 pattes par exemple. On nie littéralement à l'auteur le droit d'être allusif. Du coup, au lieu d'avoir des romans efficaces de 200 pages comme dans les années 70 (et comme ce "Ose" qui à mes yeux n'est pas mal du tout), on a des trucs délayés sur 600 pages et qui n'ont rien à dire. C'est dommage quelque part. C'est à nous de faire travailler notre imagination avec ce que les auteurs nous proposent.
Anudar a dit…
Bonjour et bienvenue ici, pour commencer.

Ai-je dit que je tenais à tout savoir ? Je te suggère d'aller voir un "vieil" article où je pense avoir montré quelle est l'importance d'un contexte non explicité dans une grande oeuvre de SF : http://grandebibliotheque.blogspot.com/2010/08/thune-episode-4-les-pires-contre.html

Pour en revenir à "Ose", ce que je reproche à ce roman c'est tout autre chose : pour moi, il n'est pas efficace en ce sens que le temps de la fiction n'est pas utilisé comme il aurait pu (dû ?) l'être. Le concept y est, le talent d'imagination y est, la perturbation de l'équilibre initial y est encore. Ce qu'il y manque, c'est un approfondissement de la réflexion qui ne figure qu'à l'état d'esquisse.

Je n'ai rien contre les romans qui ne durent "que" deux cents pages. Il y a quelques semaines, j'ai été captivé par le fameux "Palimpseste" de Charles Stross. Un roman peut être efficace en étant ramassé, j'ai même presque envie de dire que c'est une condition nécessaire de l'efficacité... A l'inverse un livre-univers devra bénéficier d'un temps fictionnel long, voire même très long. Ici, j'ai l'impression que Philip José Farmer a tenté de trouver la voie médiane, un livre-univers qui serait aussi un livre efficace.

Pour moi, c'est loupé.
Tigger Lilly a dit…
Lhisbei va être ravie de voir cette couverture, c'est mieux que la femme-lézard.